ENTRETIEN EXCLUSIF. Jacques Chanut ne décolère pas suite à l'annonce du prolongement du CITE sous sa forme "dégradée" et excluant les fenêtres et les chaudières à fioul du crédit d'impôts. Cela signe la "mort du RGE" et ne permet pas de "FAIRE", selon le président de la FFB, qui exige cohérence et transparence, lors d'une réunion qui doit se tenir dans les prochains jours.

"Dépités. Les artisans et les entreprises sont dépités. Nous n'acceptons pas cela : pourquoi ne maintiennent-ils pas leur engagement de rediscuter du CITE ? Il faut que l'on nous dise les choses ! Que révèle l'étude promise du CSTB et de l'Ademe sur l'impact du changement des fenêtres ? Pourquoi reste-t-elle sous embargo ? Pourquoi cette incohérence et ce manque de transparence ?" La colère gronde et les interrogations sont grandes du côté des artisans et des entreprises, nous déclare Jacques Chanut, le président de la Fédération Française du Bâtiment (FFB) lors d'un entretien avec Batiactu, ce jeudi 19 septembre 2018. La décision du gouvernement de prolonger le CITE d'un an sous sa forme actuelle de crédit d'impôts et excluant les fenêtres et le chauffage du dispositif - une mesure "dégradée" selon les professionnels - ne passe pas. Du tout. "Apprendre que la prime est décalée par le journal - la décision a été confirmée la semaine dernière, après une révélation de nos confrères des Echos, NDLR - nous ne trouvons pas cela normal ! Nous avons exigé une réunion, elle se tiendra d'ici la fin du mois et nous espérons que cette dernière sera basé sur l'écoute et la transparence : il est nécessaire d'écouter la réalité du terrain !"

 

"Si la sortie des fenêtres et des chaudières au fioul est maintenue du champ du CITE, c'est la mort du RGE !" J. Chanut, le 19 septembre 2018, lors d'un entretien avec Batiactu

 

Pour le président de la FFB, cette décision est "contre-productive." Les menuisiers et les chauffagistes poursuit-il, sont les premiers contacts du public sur le chemin de la rénovation énergétique, "Si la sortie du champ du CITE des fenêtres et des chaudières au fioul est maintenue, c'est la mort du RGE ! Je rappelle qu'il y a 32.000 menuisiers sur les 70.000 qualifiés RGE. Comment pourront-ils continuer à être intéressés et encouragés à maintenir leur niveau d'exigence ? Comment voulez-vous que l'on puisse accompagner la montée en gamme des compétences ?"

 

Un CITE qui représentera en 2019 entre 900 millions et 1 milliard d'euros d'aides… soit quasi une division par deux

 

Le Ministère de la Transition écologique expliquait dans son communiqué, le 14 septembre dernier qu' "après un examen approfondi, cette mesure [la transformation du CITE en prime, NDLR] est apparue coûteuse et complexe dans son déploiement : elle nécessiterait de créer une nouvelle structure à part entière et de recruter des centaines de personnes dédiées", sans préciser si la prime existera un jour. "En 2019, le CITE restera néanmoins aussi intéressant que cette année (et) devrait représenter entre 900 millions et 1 milliard d'euros d'aide octroyée" ajoutait-il, en omettant toutefois de dire que ces dernières années, le montant de l'aide était plus proche de 1,7 milliard d'euros.

 

"Nous nous sommes battus pour que nos artisans puissent et aillent se former, nous explique Jacques Chanut. Aujourd'hui, alors que cela marche, alors que cela démarre enfin, la mesure est dégradée. Cela coûte trop cher donc maintenant on la coupe, uniquement pour des raisons budgétaires. Il faut de la cohérence !" Et de marteler, "Nous n'acceptons pas d'acter le montant de cette enveloppe ramenée à seulement 800 millions ; nous n'acceptons pas de renoncer à nous élever contre cette décision de prolonger un CITE dégradé ; nous n'acceptons pas que le Gouvernement balaie d'un revers de main ses engagements de rediscuter le dispositif et ne nous dise pas ce que révèle l'étude du CSTB et de l'Ademe. Nous exigeons cohérence et transparence !"

 

"FAIRE, c'est tout faire, sans rien pouvoir faire. Communiquer, c'est bien, mais sans argent, à quoi cela sert ? Nous ne sommes pas des magiciens (...)"

 

Alors que le Gouvernement a lancé la campagne "FAIRE", le 10 septembre dernier, le président de la FFB déclare : "FAIRE, c'est tout faire, sans rien pouvoir faire. Communiquer, c'est bien, mais sans argent, à quoi cela sert ? Nous ne sommes pas magiciens : si les Français n'ont pas les moyens de réaliser leurs travaux, nous ne pourrons pas les mener."

 

"Nous ne sommes pas dans la revendication corporatiste, nous précise Jacques Chanut. CITE, déchets du bâtiment... Nous ne nous sentons pas écoutés, nous avons à chaque fois l'impression de subir une écologie punitive." Et de conclure : "Nous avons besoin d'éléments positifs et précis pour continuer à accompagner les entreprises afin qu'elles contribuent à répondre aux engagements environnementaux qui sont les nôtres au niveau national, mais aussi ceux de la France au niveau international."

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