ÉCONOMIE. Le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières de l'Union européenne ferait courir un risque de "désindustrialisation" sur le Vieux Continent, selon les professionnels du groupement Evolis qui représente notamment les filières des équipements pour le BTP et la manutention. Détails.

Le projet de taxe carbone aux frontières européennes pourrait-il avoir des effets néfastes pour l'économie française ? C'est ce qu'affirment les professionnels réunis au sein du groupement Evolis, qui représente les filières des machines pour le BTP, des équipements fluidiques, des engins de manutention et des solutions pour la production industrielle.

 

 

Selon eux, le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, ou MACF, ferait courir un risque de "désindustrialisation" sur le Vieux Continent. Pensé à l'origine pour protéger les efforts de "verdissement" des États-membres, celui-ci "risque d'être pervers en fin de compte", a déclaré à l'Agence France Presse Fabien Vincentz, président-directeur général du fabricant d'équipements de contrôle-qualité Marposs, et par ailleurs premier vice-président du syndicat Evolis.

 

Double peine

 

D'après le responsable, ces taxes "constituent un risque majeur pour les industriels, dont certains envisagent de délocaliser leur production à l'étranger", a-t-il précisé en marge des voeux du secteur. Le groupement rassemble 600 entreprises employant 84.000 salariés en France et réalisant un chiffre d'affaires annuel de 19 milliards d'euros, dont 56% proviennent de l'exportation.

 

Ses adhérents, pour l'essentiel des PME et ETI, redoutent de ne plus être en mesure d'assurer leurs exportations hors d'Europe lorsque le mécanisme aura été instauré. Pour rappel, le MACF a été proposé par l'Union européenne pour protéger les producteurs d'acier et de matières premières, obligés d'investir dans la décarbonation de leurs hauts-fourneaux et de leurs usines.

 

Pour Fabien Vincentz, il sera cependant "contre-productif" car "il a été mis en place avec une vision partielle des mécanismes économiques". Selon lui, les fabricants européens seraient ainsi confrontés à la double peine : non seulement ils s'acquitteraient d'une taxe pour utiliser de l'acier à la fois non européen et non décarboné, mais en plus ils devraient affronter la concurrence des industriels hors UE qui, pour leur part, n'auront pas à payer ces mêmes taxes.

 

Perspectives "pas radieuses"

 

 

C'est l'une des raisons pour lesquelles les perspectives du groupement pour 2024 ne sont "pas radieuses". D'après l'AFP, les ventes de machines-outils pourraient être "stables ou reculer de 5%" cette année, après avoir enregistré une progression de 6,7% en 2023. Les systèmes de pompes suivraient la même tendance.

 

Le tout dans un contexte économique marqué par les "incertitudes géopolitiques" pesant sur le commerce mondial, mais aussi par le "fléchage" des crédits publics issus du plan d'investissement France 2030, qui n'oblige pas les industriels à choisir des équipements français et européens. Selon Fabien Vincentz, les usines de batteries en cours de construction dans l'Hexagone ne contiendraient ainsi "pas plus d'un quart d'équipements européens". L'espoir de son syndicat repose désormais sur les industries nucléaire, aéronautique et navale, qui "ont une vision stratégique de long terme, clé pour la souveraineté industrielle".

actionclactionfp