ENTRETIEN. L'entrée en vigueur de la filière de responsabilité élargie du producteur (Rep) est prévue pour janvier 2023. Qu'est-ce que cela pourrait changer pour les artisans du bâtiment ? Réponses avec Jean-Yves Labat, en charge du sujet à la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb).

La filière de responsabilité élargie du producteur (Rep) entrera en vigueur en janvier 2023. Ce dispositif impactera surtout les "metteurs sur le marché", c'est-à-dire les fabricants. Mais il ne sera pas sans conséquences pour les artisans du bâtiment, comme nous en informe Jean-Yves Labat, en charge du sujet à la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb).

 

Batiactu : La filière Rep va permettre de financer la reprise des déchets du bâtiment. Les artisans seront-ils concernés ?

 

Jean-Yves Labat : Ce sont en premier lieu les industriels qui financeront le dispositif via leur adhésion à un ou plusieurs éco-organismes [quatre structures ont été agréées par l'État, NDLR]. Ce coût sera répercuté dans les prix de vente des produits et matériaux. Concrètement, une fraction du tarif d'une plaque de plâtre correspondra au montant de l'éco-contribution.

 

Batiactu : L'artisan du bâtiment devra-t-il donc vendre plus cher ses prestations, compte tenu de cette éco-contribution ?

 

J-Y. L. : Entre l'industriel et l'artisan, il y a le négoce. C'est ce dernier qui facturera aux artisans le montant des produits, en indiquant le 'surcoût' de la Rep, élément par élément. Évidemment, aucune plus-value ne doit être réalisée par aucun acteur tout au long de la chaîne.

 

Batiactu : L'artisan devra-t-il mentionner sur son devis le montant de l'éco-contribution ? Si oui, de quelle manière ?

 

J-Y. L. : C'est un point qui fait encore l'objet de discussions. Nous souhaiterions que les devis des artisans indiquent au maître d'ouvrage que le montant TTC des prestations inclue l'éco-contribution. Ce qu'il nous faut éviter, c'est que l'artisan doivent détailler à la virgule près ce que cela coûte pour chaque produit et matériau... Quand on fabrique un ouvrage, nous en utilisons une multitude ; nous proposons donc d'inclure dans le document une phrase juridiquement bordée pour informer nos clients. Ne faisons pas de nos devis et factures des romans ! Rappelons par ailleurs que depuis le 1er juillet 2021, nous avons déjà l'obligation de mentionner sur nos devis de travaux un certain nombre d'informations, notamment une évaluation de la quantité de déchets produits, et d'indiquer dans quelle déchetterie nous allons les transporter.

 

Batiactu : Au-delà de ces aspects administratifs, qu'est-ce que changera la Rep pour les artisans du bâtiment ?

 

J-Y. L. : La Rep entraînera un meilleur tri des flux. Jusque là nous en avions quatre ou cinq à gérer, dans le futur dispositif nous irons jusqu'à sept. Cela ne bouleversera pas les habitudes des artisans du bâtiment, qui pratiquent déjà le tri et ont l'habitude d'aller en déchetterie.

 

Batiactu : Certaines entreprises se plaignent du mauvais maillage du territoire en déchetteries. Est-ce justifié ?

 

J-Y. L. : Laissons le temps au dispositif de murir avant de le critiquer. L'éco-contribution sera progressive, la Rep montera en puissance. Les déchetteries devront être équipées pour récupérer les sept flux, et il faudra bien sûr faire en sorte qu'il n'y ait pas de zones blanches.

 

Pour simplifier la vie des artisans, nous militons à la Capeb pour la création d'une application qui leur indiquerait les points de collecte les plus proches d'eux, en fonction des déchets qu'ils ont à gérer et de leur quantité. Nous nous battons également pour que certains artisans qui produisent, tels que des métalliers, ou des charpentiers, ne soit pas identifiés dans le dispositif en tant que metteurs sur le marché. L'éco-contribution doit s'arrêter à leurs fournisseurs ! Cela représente un petit pourcentage des entreprises de bâtiment, mais nous devons en tenir compte. Plusieurs réunions auront lieu d'ici à la fin de l'année pour discuter de ces points avec les éco-organismes et les pouvoirs publics.

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