Comme la loi relative à la transparence de la vie publique l'y oblige, les sénateurs ont été aussi contraints de dévoiler l'utilité de l'argent public. Ainsi à cinq jours des élections sénatoriales, les près de 6.500 subventions liées à la construction, la rénovation et à l'aménagement public sont passées au crible dans cette analyse des données de la réserve parlementaire. Décryptage.

Mieux vaut tard que jamais. Réaménagement d'une école élémentaire, réfection d'un centre ancien, érection d'une statue à la gloire du général De Gaulle, restauration du clocher de l'église, aménagements, constructions… A cinq jours des élections sénatoriales*, toutes les dépenses liées à la construction et à l'aménagement public ont été passées au crible, par Bercy, après la diffusion de l'analyse des données de la réserve parlementaire, le week-end dernier. Cette dernière a, en effet, été mise en ligne discrètement dès le samedi 20 septembre 2014, sur le site du ministère des Finances et des Comptes publics.**

Une enveloppe auparavant opaque…

Comme la loi relative à la transparence de la vie publique l'y oblige au lendemain de l'affaire Cahuzac, le Parlement est désormais contraint de dévoiler l'utilité de l'argent public. Après la révélation des chiffres à l'Assemblée nationale en janvier dernier, le Sénat à son tour a introduit la publication de la réserve parlementaire. L'utilisation de cette enveloppe, auparavant opaque, servant à financer les projets de collectivités territoriales ou d'associations, est donc maintenant publique.

 

Un chiffre à retenir ? En 2013, le montant des 6.493 subventions destinées aux associations et collectivités territoriales s'élève à 53,7 millions d'euros - les groupes parlementaires ayant perçu entre 130.000 et 150.000 euros par sénateur.

"Un principe pratiqué par les parlementaires depuis des décennies"

Parmi les enseignements de ce document, on note que des sénateurs ont été gâtés par les services de la Haute Assemblée, pour construire ou rénover des lieux publics. Par exemple, Philippe Marini (UMP), le sénateur-maire de Compiègne a donné un chèque de 200.000 euros pour l'aménagement de la rue piétonne Sainte-Cormeille, 138.000 euros pour la rénovation de la galerie médiévale du cloître et aussi 61.379 euros pour la réfection des trottoirs en 2012. Au final, Philippe Marini, également président de la Commission des Finances, a eu droit à une enveloppe de 2.158.728 euros.

 

Dans la presse, notamment dans Le Parisien, ce mardi 23 septembre, le sénateur se défend : "Il s'agit d'une activité d'intérêt général. (…) Le fait d'être plus investi au Parlement peut apporter des moyens supplémentaires pour agir au plan local." D'après l'élu de l'Oise, "c'est aussi un principe pratiqué par les parlementaires depuis des décennies."

Exemples de projets subventionnés par les réserves parlementaires

Parmi les autres projets subventionnés par les réserves parlementaires, on remarque une kyrielle d'exemples : la sénatrice du Morbihan, Odette Herviaux (PS), a ainsi versé 13.717 euros pour le réaménagement de l'école élémentaire Marcel Pagnol (8ème tranche) en 2012 à… Aiguillon, commune située dans le Lot-et-Garonne. Egalement, Daniel Raoul (PS), sénateur du Maine-et-Loire a financé la réfection en 2012 du centre ancien d'Agel (Hérault) pour la somme de 21.814 euros. A noter aussi : le ministre du Travail, François Rebsamen (PS), a participé, en tant que sénateur de la Côte-d'Or en 2012, à l'aménagement d'une aire de jeux extérieurs pour enfants sur Aiserey (Côte-d'Or). Enfin, la sénatrice Gisèle Gautier a contribué à la reconstruction du groupe scolaire Camus à Ancenis pour la somme de 32.351 euros. Sans oublier l'ancien président du Sénat, Gérard Larcher, (UMP) sénateur des Yvelines, qui a aidé en 2009 à la participation financière des travaux d'enfouissement aérien dans le bourg d'Antezan-La-Chapelle et dans la traversée de la Chapelle-Bâton (Charente-Maritime) pour une somme de 18.205 euros.

 

A noter également : sur les 6.493 subventions, près de 535 concernent la rénovation de lieux de culte comme une vieille église romane, l'entretien d'un monastère ou la réfection de vitraux, ce qui représente un total de 3,2 millions d'euros, soit 6 % de la réserve parlementaire.

 

Au final, ce document fourni par Bercy suscite de nombreuses réactions chez les associations pour la défense et le respect du citoyen. La date de publication peut poser question et éventuellement troubler le scrutin, puisque ces données mettent en lumière l'utilisation de l'argent public par des sénateurs en lice pour leur réélection, s'accordent à dire également les professionnels de droit public. Pour rappel : le document aurait dû être rendu public en juillet 2014 au moment du vote de la loi de règlement du budget 2013.

 

 

*Les élections sénatoriales se déroulent ce dimanche 28 septembre.

 

** Découvrez l'analyse des données de la réserve parlementaire, dédiée aux subventions du Sénat aux collectivités locales sur le site du ministère des Finances et des Comptes publics.

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