Une étude inédite réalisée conjointement par le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) et l'Ecole des hautes études en santé publique (EHESP) montre que le plomb est toujours bien présent dans l'habitat. Dans l'eau, mais aussi la peinture, malgré l'interdiction de 1949. Avec pour conséquence des risques de saturnisme. Précisions.

Pour la première fois en France, une étude du Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) et de l'Ecole des hautes études en santé publique (EHESP), réalisée au sein de 484 foyers, dresse un état des lieux inquiétant de la contamination au plomb et autres métaux toxiques auxquels sont exposés des enfants âgés de 6 mois à 6 ans.

 

Elle a permis de mesurer le plomb dans l'eau du robinet, dans les peintures ainsi que dans les poussières déposées au sol. Les prélèvements sur les espaces extérieurs à l'habitat, aires de jeux ou parties communes des immeubles le cas échéant, ont complété ces investigations.

 

L'arrêt des peintures au plomb
Quels en sont les résultats ? Ils sont présentés par extrapolation des 484 habitations investiguées aux 3,6 million d'habitations abritant au moins un enfant de six mois à six ans en France et comparés aux valeurs réglementaires ou aux valeurs guides disponibles en France ou dans d'autres pays. Bilan : Environ 105.000 de ces 3,6 million habitations présentent une concentration de plomb dans l'eau du robinet supérieure à 10 µg/L, valeur limite maximale fixée par la commission européenne à compter du 1er janvier 2013 (contre 25 µg/L à ce jour).

 

Concernant les poussières déposées au sol, c'est la mauvaise surprise. Dans 7.500 habitations et 45.000 parties communes, leur concentration en plomb est supérieure aux recommandations fédérales américaines (40µg/ft² soit environ 430 µg/m²). Cette contamination est liée notamment à la présence de peintures au plomb ; 878.000 logements en contiennent, dont près de 170.000 (4,7 %) dans un état dégradé pouvant exposer les enfants. Tandis que la date de 1949 est considérée comme marquant l'interdiction des peintures au plomb en France, l'étude confirme qu'en réalité ce n'est qu'après 1974 que la présence de peinture au plomb diminue.

 

De plus, il est révélé que 37.000 espaces de plein air présentent une teneur en plomb supérieure au seuil actuellement en vigueur aux Etats-Unis pour la terre (400 mg/kg). La quantité de poussière de plomb recueillie en extérieur atteint un niveau environ 3,2 fois supérieur au plus haut niveau de poussière intérieure prélevée. « Au-delà de ces constats, et comme le plomb agit sans seuil de toxicité, les données sur les enfants exposés en deçà de ces seuils pourront également servir aux pouvoirs publics pour piloter la poursuite des actions de prévention des expositions au plomb », souligne l'analyse.

 

Financée par les ministères en charge de la santé, du logement et de l'écologie, l'enquête, démarrée en 2008 dans le cadre du projet Plomb-Habitat, en partenariat avec l'Institut de veille sanitaire, le laboratoire de toxicologie de l'hôpital Lariboisière (AP-HP) et l'Institut Supérieur d'Agriculture de Lille, vient seulement d'être bouclée. « Nous avons envoyé les données aux pouvoirs publics. Une réflexion va être lancée à l'automne pour savoir si l'on doit abaisser les seuils de présence du plomb », concluent les experts du CSTB et de l'EHESP.

 

Suivre l'exemple d'outre-Rhin ?
En Allemagne, par exemple, on est passé de 100 microgrammes par litre de sang à 35. « Des études ont montré des effets nocifs sur la santé même en dessous de ces valeurs », ajoutent-ils. D'autre part, le CSTB mène une action pour améliorer le diagnostic plomb réalisé lors de la vente d'un logement.

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