Avec plus de 900 millions de m² de surfaces, le parc de bureaux est un enjeu crucial de l'amélioration des performances du bâti. Le Plan Bâtiment Durable fait le point sur trois années d'actions menées par la centaine de signataires de la Charte pour l'efficacité énergétique des bâtiments tertiaires publics et privés.

Le parc tertiaire, public et privé, est - en théorie - soumis à une obligation de travaux d'amélioration de la performance énergétique depuis le 1er janvier 2012, en application de la loi Grenelle 2 (art. 3 de la loi du 12 juillet 2010). Mais les modalités d'application ne sont pas encore totalement définies : ce fameux décret est, actuellement, au Conseil d'Etat pour une publication attendue dans les prochains mois. Le but : rénover ces plus de 931 millions de mètres carrés chauffés d'ici à 2050, pour parvenir à réduire de 60 % la consommation d'énergie finale par rapport au niveau de 2010. En 2013, alors que l'attente de la publication de ce décret freinait le marché de la rénovation, c'est le Plan Bâtiment Durable qui a pris l'initiative de mobiliser les acteurs en rédigeant une charte. Philippe Pelletier, le président du Plan, raconte : "Que de chemin parcouru, que de perspectives pour l'avenir ! Voici déjà trois ans que notre charte d'engagement volontaire est lancée, trois ans que de grands acteurs ont dit la volonté de leur entreprise de se lancer dans la rénovation énergétique des bâtiments qu'ils détiennent ou utilisent".

 

 

La difficulté de la concrétisation

 

S'ils étaient une trentaine, en octobre 2013, ils sont aujourd'hui plus d'une centaine, avec l'arrivée des 103e et 104e signataires, le fonds d'investissement LBO France et le bureau d'études Tribu Energie. En paraphant ce document, les entreprises s'engagent à diminuer leurs consommations, à la fois par l'adoption de nouvelles méthodes et par la réalisation de travaux. Aucun objectif chiffré n'est toutefois exigé par la charte, qui est ouverte à toutes les entités, publiques ou privées. Deux premiers rapports de suivi avaient été publiés, avec le soutien technique du CSTB et financier de la DHUP, en septembre 2014 et juin 2015. Ils identifiaient les niveaux visés par les signataires et mettaient en lumière les différentes stratégies adoptées. Un troisième opus, cette fois réalisé par l'Institut français de la performance du bâtiment (Ifpeb), vient les compléter. Il est basé sur les réponses apportées par 37 adhérents à la charte qui sont tous à l'œuvre dans l'implémentation de leurs engagements.

 

Le document distingue trois groupes plus ou moins homogènes. Les pionniers tout d'abord, dont la politique énergétique a atteint la maturité, les entreprises en cours de déploiement de leur initiative, et les signataires dont l'adhésion à la charte leur permet de fédérer des employés en interne. Les objectifs de réduction varient grandement, entre -6 % et -40 %. Le Plan Bâtiment Durable souligne : "Si certains répondants sont en ligne avec la trajectoire qu'ils ont prévue, d'autres sont en-deçà, en prise avec les difficultés de mise en œuvre". Quatre problèmes opérationnels apparaissent à ce stade : la construction de l'image énergétique du parc immobilier, une étape chronophage et complexe d'analyse ; la collaboration minimaliste entre propriétaires-bailleurs et preneurs, parfois insuffisante pour enclencher une dynamique ; la question de l'évaluation du parc dans le temps face à la variation de son périmètre notamment face à des opérations de densification ; et enfin, le coût des opérations, qu'il faut absorber dans les cycles immobiliers. Le Plan Bâtiment Durable mentionne : "Les seuls signataires dans l'incapacité d'agir, généralement publics, l'étaient pour des raisons budgétaires".

 

Des moyens aussi divers que les objectifs à atteindre

 

 

Des grands utilisateurs rappellent que l'optimisation des surfaces et les relocalisations "seront les piliers de leur progression". En moyenne, les répondants ont évalué à 13 % d'accomplissement leur objectif d'économies d'énergie aux rénovations lourdes, 31 % à des plans de progrès en site occupé avec un certain investissement, 32,5 % dans des plans de progrès liés au pilotage des installations et 13,5 % de leur objectif sur une simple question de meilleur usage. Le management in situ a donc son importance, afin d'intéresser les services et prestataires. "La mobilisation des acteurs doit être bien comprise : c'est bien de la collaboration entre utilisateurs et pilotes d'exploitation qui est le premier levier, lorsqu'il s'agit de recadrer le pilotage au plus près de l'usage". Selon Philippe Pelletier, le rapport met en lumière l'un des facteurs clé de la réussite : "Porter la démarche d'amélioration de l'efficacité énergétique comme un véritable projet d'entreprise impliquant collaborateurs et équipes managériales". L'avocat, spécialiste des questions immobilières, conclut : "Il ne fait aucun doute qu'à la publication du décret, la charte continuera de déployer ses effets : le 'club' de signataires ainsi formé est précieux dans les échanges d'expériences et de bonnes pratiques". La dynamique est donc lancée.

 

Appel à manifestation d'intérêt pour la rénovation énergétique des bâtiments des collectivités locales :
La Caisse des Dépôts a lancé, ce 5 octobre 2016, un appel à manifestation d'intérêt pour accompagner les collectivités locales dans leur démarche de rénovation énergétique du patrimoine bâti. Il concerne les communes et groupements de communes comprenant entre 10.000 et 100.000 habitants. Pour les collectivités de 10.000 à 50.000 habitants, elles doivent présenter un patrimoine "suffisamment important" et une facture énergétique annuelle supérieure à 750 k€ (ou 500 k€ pour les seuls bâtiments). Pour celles entre 50.000 et 100.000 habitants, elles devront disposer d'un plan climat énergie territorial et d'un bilan des émissions de gaz à effet de serre, avec une capacité de suivi.
En tout, 10 petites collectivités et 20 plus importantes seront identifiées afin de les engager rapidement dans des projets de rénovation. Elles bénéficieront d'un appui méthodologique, d'une aide au financement des études et de soutien pour élaborer leurs programmes de travaux. Elles seront également soutenues pour le montage financier permettant de démarrer rapidement les rénovations énergétiques.

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