Ségolène Royal a présenté une version allégée de la Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) qui ne fixe des objectifs que pour les filières renouvelables, s'apparentant davantage à une programmation pluriannuelle des investissements. Si les professionnels du secteur affichent une certaine satisfaction, d'autres s'inquiètent de la non publication d'un texte plus général.

Officiellement, la mise en œuvre de la loi de Transition énergétique pour la croissance verte, chère à Ségolène Royal, nécessite deux outils : la stratégie nationale bas carbone et la programmation pluriannuelle de l'énergie. Cette dernière décline, de façon opérationnelle, les orientations de la politique énergétique nationale, d'abord pour une première période de trois ans (2016-2018), qui décrira une trajectoire cible, puis sur une seconde (2019-2023), afin d'évoquer différents scénarios possibles se traduisant par des fourchettes de valeurs pour les différents aspects. Sa mise en consultation aurait dû intervenir, au plus tard, le 31 décembre 2015, mais, c'est avec un retard de plusieurs mois qu'une version simplifiée a finalement été annoncée par la ministre de l'Environnement.

 

La question nucléaire éludée

 

Techniquement, alors que la PPE devait concerner l'ensemble du mix énergétique français, c'est finalement sur le seul développement des renouvelables que porte le texte adopté ce vendredi 15 avril 2016, par le Conseil supérieur de l'énergie. La question nucléaire est, par exemple, pudiquement écartée, de même que la problématique de maîtrise de la demande. Cette PPE allégée ne constitue donc qu'une programmation pluriannuelle des investissements (PPI) revue. Une limitation qui interroge des acteurs de la transition. La Coalition France pour l'Efficacité Energétique souligne, par exemple, que cette PPE "doit se fonder sur des scénarios de consommation d'énergie intégrant des objectifs de baisse prévus dans la loi sur la Transition énergétique". Elle renchérit : "La maîtrise de la demande en énergie souffre, aujourd'hui, d'un manque chronique de vision globale et de l'éparpillement des initiatives alors même qu'elle doit être la pierre angulaire du modèle énergétique français". Même constat du côté de la CFDT, qui souhaite que la véritable PPE "soit publiée dans les plus brefs délais". La confédération insiste : "(…) la présentation de la PPE a été plusieurs fois reportée. Une fois de plus, ce projet ne comporte ni scénarios de consommation, ni mix énergétique complet".

 

Les filières EnR (presque) entièrement satisfaites

 

Une inquiétude que ne partagent plus les professionnels EnR, seuls concernés par le texte. Le Syndicat des énergies renouvelables (SER) précise "se réjouir du résultat pour l'éolien terrestre, qui voit ses objectifs 2018 et 2023 revus à la hausse par rapport au texte initial, et pour le biométhane injecté dont l'objectif est confirmé à 8 TWh". Il est également "très satisfait des calendriers indicatifs de lancement des appels d'offres qui ont pu être introduits à sa demande dans le projet de texte". Mais, tout comme France Energie Eolienne, le syndicat pointe quelques déceptions : "(...) les objectifs pour les EMR, l'éolien offshore posé et la cogénération biogaz n'ont pas été relevés". Faible lueur d'espoir pour les énergies marines, "le gouvernement a proposé que, lors du prochain rendez-vous de 2018, certains objectifs jugés insuffisants, soient revus en fonction des retours d'expérience et de l'évolution des coûts". L'Association française pour les pompes à chaleur s'est dite, elle, réjouie des objectifs dédiés à sa filière (2.200 ktep de production d'énergie en 2018 contre 1.600 ktep en 2014, puis 2.800 à 3.200 ktep à la fin de 2023) : "Avec ces perspectives, on peut espérer une 'montée en biseau' des ventes annuelles de PAC vers un objectif qui pourrait atteindre, en 2023, 115.000 à 170.000 PAC air-eau et géothermiques, 410.000 à 475.000 PAC air-air et 130.000 à 190.000 chauffe-eau thermodynamiques, tous marchés confondus, y compris les renouvellements d'équipements". Des progrès notables pour ces marchés, qui afficheraient alors une croissance annuelle comprise entre +5 et +10 %.

 

Malgré tout, l'ensemble des professionnels des renouvelables insistent sur l'importance de ne pas se focaliser sur les seuls objectifs chiffrés mais d'accorder toute l'attention aux mesures concrètes d'aide, de soutien et de financement. L'Afpac déclare notamment : "La progression sur ce marché d'ici à 2018 ne sera possible que grâce à l'accompagnement du CITE, qui ne doit pas être remis en cause dans le cas des seules PAC, tel que c'est envisagé dans le projet de PPE". Jean-Louis Bal estime, quant à lui, que l'essentiel du travail à mener portera sur les moyens accordés et sur les simplifications réglementaires. Il milite également pour la publication de la PPE complète, portant sur toutes les filières et sur l'ensemble du territoire français, y compris les Outre-mer.

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