Le premier prêt à l'habitat "charia compatible" a été octroyé en France à un "sportif de haut niveau" a annoncé l'Association d'innovation pour le développement économique et immobilier. Son principe permet de ne pas avoir à reverser des intérêts, une pratique contraire à l'Islam. Explications.

C'est lors d'un colloque sur la finance islamique mercredi à Strasbourg qu'Anass Platel, président de l'Association d'innovation pour le développement économique et immobilier (Aiddim), a annoncé la réalisation de la première opération de prêt habitat, "charia compatible", des propos dont l'AFP fait écho. Le bénéficiaire serait un "sportif de haut niveau" pour une maison en région parisienne. Concrètement, le mécanisme adopté est celui d'un achat-revente - "Murabaha" - selon lequel la banque achète le bien immobilier et le revend ensuite au bénéficiaire, avec une marge. Cela permet à ce dernier de ne pas avoir à payer des intérêts, une pratique contraire à la religion musulmane.

 

Le respect de convictions religieuses
Selon l'Aiddim - qui promeut le développement de la finance islamique en France - un certain nombre de musulmans s'abstiennent en effet de contracter des prêts en attendant l'arrivée de produits financiers en conformité à leur religion. Un sondage, réalisé en mai 2008 par l'Ifop pour le compte de l'Ifaas et l'Aiddim, montrait ainsi que "sur les 65% de personnes interrogées qui se privent de tout emprunt à intérêts, plus de 12% ont déclaré ne pas le faire pour des raisons uniquement religieuses". L'enquête chiffrait même à plus de 500.000, les personnes intéressées par des offres de financement conformes à leur religion.

 

Mais la finance islamique reste très marginale en France, en particulier pour le grand public. Anass Platel, dans une interview à nos confrères de Capital.fr, reprise sur le site de l'Aiddim, expliquait que "depuis le début des années 2000, toutes les grandes banques françaises ont développé ces pratiques pour le compte d'investisseurs institutionnels issus du Moyen-Orient. Mais la finance islamique ne représente encore que 3 à 4% des 27 milliards d'euros d'investissements institutionnels immobiliers en France. En cause : des contraintes juridiques et fiscales encore trop nombreuses comme, par exemple, la double imposition du financier sur les droits de mutation dans les contrats d'achats-ventes..."

 

Quatre produits mieux accessibles
Le 24 août dernier, quatre nouvelles instructions fiscales parues au Bulletin Officiel des Impôts sont venues "préciser le régime fiscal applicable aux principaux outils de la finance islamique existants" et lever certains de ces verrous fiscaux qui freinaient jusqu'alors leur emploi. Des mesures attendues depuis plusieurs mois par les acteurs de la finance islamique et annoncées par la ministre de l'Economie, Christine Lagarde, en juillet dernier. Les opérations concernées sont celles du type "Suruk" (proche des obligations conventionnelles), "Mourabaha" (achat-revente avec marge servant de financement), "Ijara" (proche d'un crédit-bail) et "Istina" (vente d'un bien livré à échéance, proche de la VEFA). "On peut retenir, explique ainsi l'Aiddim sur son site internet, que ces quatre instructions ont pour trait commun de ne pas se limiter à un montage particulier, mais de poser un véritable cadre général. Libre ensuite aux acteurs de structurer, dans ce cadre de droit français, des opérations potentiellement compatibles avec le droit musulman."

 

Selon Anass Platel, cité par l'AFP, le marché des crédits résidentiels respectant les principes de la loi islamique peut être estimé en France à 7,2 milliards d'euros. Ce premier prêt à l'habitat contracté en France devrait faire "progresser la mise au point du produit".

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