Dessinateur, maître d'œuvre, restaurateur, scieur, tailleur, graveur, marbrier, sculpteur ou encore carrier... Près de 16.000 personnes travaillent dans les métiers de la pierre, et entretiennent aujourd'hui ce savoir-faire ancestral en mettant leur habileté au service de la construction neuve comme de la restauration. Qui sont-ils ? Que font-ils ? Quelles sont leurs perspectives d'avenir ? Découverte.

Entre le marteau et l'enclume, la pierre est domptée par nombre de professionnels qui tentent de faire revivre des ouvrages d'exception. Murs, escaliers, balustrades, corniches, arcs, linteaux, voûtes… Près de 16.000 personnes aujourd'hui allant du restaurateur, scieur, tailleur jusqu'au carrier en passant par le marbrier ou sculpteur travaillent aussi bien le marbre que le granit, le calcaire ou le grès, selon l'ouvrage à concevoir et parfois la région où il est réalisé.

Le décor et l'activité de la chaux comme locomotives

"Après un fort repli dans les années 1980, notamment des travaux de restauration des monuments historiques, c'est le secteur de la décoration et du luxe par la marbrerie tout comme l'activité de la chaux qui ont relancé ce domaine au cours de ces dernières années, nous explique Arnaud Mallet, responsable de l'Institut Supérieur des Métiers de la Pierre au sein des Compagnons du Devoir. L'arrivée des machines de façonnage numérique a d'ailleurs amélioré les conditions de travail."

 

Les métiers de la pierre, en l'occurrence le tailleur, sont sollicités autant pour des programmes de restauration neuve que de restauration. "Le tailleur de pierre conçoit, sur mesure, des éléments architecturaux en pierre de taille, trace sur le bloc de pierre, de façon très précise, le modèle à tailler et passe ensuite à la taille proprement dite, avec des outils adaptés à la dureté de la pierre à façonner, précise Arnaud Mallet chez Les Compagnons du Devoir. Et une fois les éléments ouvragés terminés, il les déplace sur le chantier et procède à leur mise en œuvre."

 

D'ailleurs, le tailleur de pierre utilise aussi bien les outils traditionnels de la taille de pierre et de la marbrerie, que des outils mécaniques, électroniques et à commandes numériques.

"Un certain goût pour l'histoire de l'art"

Les qualités et aptitudes attendues de ce métier "exigeant", nécessitant avant tout des connaissances artistiques, consistent donc en une bonne visualisation des volumes, de la précision, de la créativité, et de l'aptitude à travailler en équipe. "Un certain goût pour l'histoire de l'art est également apprécié, ajoute Arnaud Mallet. Le jeune tailleur de pierre peut, en effet, se spécialiser dans la gravure d'inscriptions et de motifs décoratifs (graveur sur pierre), la création ou restauration d'oeuvres sculptées dans la pierre (sculpteur sur pierre) ou également intervenir en restauration du patrimoine."

 

Parmi les qualifications requises, le CAP divisé en deux, de l'un côté tailleur de pierre, de l'autre marbrier; le brevet professionnel et le Baccalauréat professionnel peuvent être préparés en contrat de professionnalisation ou à temps plein, ce qui représente en CAP, près de 900 heures de formation sur deux ans. "Pour les professionnels désireux de développer leurs compétences, ils ont la possibilité de préparer un Brevet technique des métiers supérieur BTMS, de niveau III)", complètent Les Compagnons du Devoir. Le BTMS de la pierre s'adresse ainsi aux futurs chefs d'ateliers ou chefs d'équipes après une expérience confirmée ou une formation et enfin aux chefs d'entreprise des métiers de la pierre après quelques années d'expérience et une formation en gestion et pilotage d'entreprise.

 

De plus, les centres AFPA préparent un titre professionnel tailleur de pierre de niveau V. En parallèle, une vingtaine de formations non diplômantes, d'une durée variant d'une semaine à dix mois ou des cours à la semaine, permettent de suivre une initiation ou un perfectionnement dans les techniques de la taille de pierre.

S'adapter aux évolutions du numérique

"Au final, il n'existe pas de gros freins pour être embauché, conclut Arnaud Mallet. L'essentiel, c'est de laisser parler son envie et le goût de la pierre d'autant plus que l'apport du dessin assisté par ordinateur (DAO) et de la conception assistée par ordinateur (CAO) contribuent à l'évolution du métier." Côté salaires, un jeune diplômé démarre à 1.300 euros brut, puis touche 2.100 euros brut après quelques années d'expérience alors qu'un chef d'agence est rémunéré 4.000 euros brut.

 

Témoignage de Charles Dubreil compagnon dans la taille de pierre : "Il faut se donner les moyens"
Charles DUBREIL apprenti
Charles Dubreil, tailleur de pierre en apprentissage. © Charles Dubreil
Pour Charles Dubreil, âgé de 20 ans et jeune compagnon tailleur de pierre jusqu'en juin prochain dans l'entreprise Favre à Vignoles (Côte d'Or), "c'est avant tout un métier qui rend hommage aux travaux réalisés par les ancêtres." "Pour y arriver, il faut se donner les moyens et utiliser la pierre intelligemment", ajoute le jeune artisan en formation, qui consacre ses quotidiens à la réalisation de corniches d'escaliers ou d'appuis de fenêtres. Avant de poursuivre : "On n'a pas le droit de faire n'importe quoi avec, c'est pourquoi le sens pratique et une bonne culture générale dans l'histoire de l'art sont nécessaires."

 

D'ailleurs, relevés, dessins, panneaux de taille sont les principales missions qu'il affectionne. En parallèle de son activité, Charles Dubreil s'est illustré aux dernières Finales Nationales de la WorldSkills Competition à Strasbourg, en janvier dernier en décrochant la médaille de bronze. "Mon patron a eu l'amabilité de me libérer une semaine, ce fut une excellente expérience de rivaliser avec les meilleurs compagnons de la discipline", confie-t-il. Dès la fin de son Tour de France des Compagnons du Devoir, le jeune tailleur de pierre compte dès l'été prochain prendre une année sabbatique en Irlande, puis s'installer à son compte, à Nantes, sa ville d'origine.

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