Si la sulfureuse réforme des retraites a retenu toutes les attentions lors du conseil des ministres de mercredi 28 mai, Jean-Jacques Aillagon , ministre de la culture et de la communication, a pu présenter son projet de loi modifiant la loi du 17 janvier 2001 relative à l'archéologie préventive. Ce projet suscite la contestation de nombreux archéologues.

Ce projet de loi vise "à remédier aux graves dysfonctionnements, notamment financiers, qui sont rapidement apparus dans la mise en oeuvre de la loi" du 17 janvier 2001.
L'archéologie préventive (90% des fouilles en France) concerne les fouilles d'urgence menées sur des sites où doivent être construits routes, lignes de chemins de fer, aménagements publics ou privés.Ces fouilles sont actuellement menées par quelque 1.600 archéologues (la moitié en France) dépendant de l'Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP), établissement public créé après l'adoption de la loi du 17 janvier 2001, en déficit de 40 M EUR.

La loi de 2001 a institué le principe "casseur-payeur" à travers un système complexe de redevances, contesté par certains aménageurs et élus locaux. A l'automne dernier, les parlementaires avaient voté une réduction de ces redevances de 25%.

Le nouveau texte prévoit l'instauration d'un "système de redevance générale payée par tous les aménageurs au delà d'un certain seuil (5.000 m2)", dont le taux a été fixé à 0,32 euros/m2, a-t-on précisé au ministère.
Cette redevance sera affectée au financement des diagnostics, de l'INRAP, de l'exploitation scientifique des travaux et enfin, à hauteur de 30%, à un "fonds de péréquation pour les aménageurs en difficultés".

Par ailleurs, selon le texte, la réalisation des diagnostics est ouverte aux services archéologiques agréés des collectivités territoriales.
Le projet prévoit également l'ouverture à la concurrence des opérations de fouilles à la charge de l'aménageur, ce dernier pouvant choisir l'opérateur parmi les organismes publics et privés agréés par l'Etat.
"Pratiquement, l'INRAP et les services archéologiques des collectivités territoriales vont continuer à effectuer la plupart des fouilles, la France ne comptant que deux minuscules organismes privés agréés", a-t-on souligné au ministère.

Réunis en intersyndicale, des archéologues de l'INRAP, du CNRS et des collectivités territoriales, multiplient depuis des mois les actions un peu partout en France pour exiger le retrait de ce texte, qui, selon eux, préfigure "la privatisation de l'archéologie préventive".
Ils dénoncent, outre la mise en concurrence des fouilles, "l'éparpillement des intervenants" et "un transfert de compétences vers les collectivités territoriales qui dans bien des cas ne disposent ni des moyens, ni des structures" nécessaires.

Le texte "réaffirme le rôle de l'Etat, rappelle le principe de l'insertion de l'archéologie préventive dans le service public de la recherche archéologique, ainsi que la nécessaire conciliation entre ses missions et les impératifs de l'aménagement du territoire", a tenu à souligner le porte-parole du gouvernement Jean-François Copé, à l'issue du Conseil.

La réforme entend "instituer une phase de dialogue entre l'Etat, qui décide des opérations d'archéologie préventive, l'aménageur, dont le projet implique l'étude préalable des vestiges qui pourraient être détruits, et l'organisme qui conduira ces opérations de sauvetage", a-t-il ajouté.

actionclactionfp