Deuxième cause du cancer du poumon, avec quelque 2.000 décès chaque année, mais suscitant peu d'intérêt de la part des pouvoirs publics, le radon est pourtant un véritable fléau dans les bâtiments rénovés. C'est en substance le message qui sera délivré lors du 5e colloque Les Défis Bâtiment Santé*. Explications avec Suzanne Déoux, sa présidente.

Economiser l'énergie sans renouveler en même temps l'air des bâtiments accroît le risque d'exposition au radon. Voici la conclusion d'une étude menée en Suisse sur quelque 160 habitations ayant subi une rénovation énergétique. Et c'est à partir de cet exemple probant que Suzanne Déoux, présidente de l'association Bâtiment Santé Plus, entend faire bouger les curseurs en France sur ce risque.

 

En effet, l'étude montre qu'une des conséquences inattendues de la rénovation énergétique des bâtiments en Suisse a été la forte augmentation de la concentration de radon dans l'air intérieur. Sur les 160 habitations mesurées, il apparaît, après rénovation, une croissance moyenne de 25% du radon, et même de 35% lorsqu'il s'est agi de remplacement de fenêtres ! En cause ? l'absence de ventilation.

 

En France, les professionnels ne sont pas encore sensibilisés par le problème. Les chauffagistes, en première ligne sur ce type de chantiers, ne sont pas formés. Architectes et constructeurs ne sont pas plus mobilisés. "Il y a encore beaucoup de pédagogie à faire", admet Suzanne Déoux. Et des questions de coût ou de surcoût en matière de construction à régler…

Urgence pour la maison individuelle

Le radon, catastrophe sanitaire ? Oui, si l'on considère qu'il provoque chaque année en France environ 2.000 décès par cancer du poumon (source InVS). Totalement inodore et incolore - et issu de la désintégration naturelle de l'uranium présent dans la croûte terrestre, notamment en présence de sous-sols granitiques et volcaniques - il est pourtant présent de manière concentrée dans les bâtiments. Un cadre réglementaire existe, en particulier pour les Etablissements recevant du public (ERP), mais il ne couvre absolument pas l'habitat individuel. Il y a donc urgence !
Mais le risque radon n'est pas pris à sa juste mesure, et continue de poser un certain nombre de problèmes dans le secteur du bâtiment.

 

Carte radon
Carte radon © IRSN
Des controverses en haut-lieu, ainsi qu'une réglementation "ventilation" inexistante ne font qu'aggraver les risques. Sans compter que la directive européenne EURATOM attend d'être transposée, ce qui ne devrait avoir lieu que d'ici à 2018… En outre, si à partir de la réglementation existante, une cartographie a été établie pour distinguer les 31 départements prioritaires, une autre indique le potentiel de radon dans les sols. Mais elles ne sont pas cohérentes ! (voir carte ci-contre). En outre, les seuils d'intervention restent, eux, fixés, depuis 2004, à 400 et 1.000 Bq/m3, alors que la nouvelle valeur de référence instituée par la Commission internationale de protection radiologique (CIPR) est de 300 Bq/m3 ! La France n'a donc pas encore réagi, mais les choses seraient en passe d'évoluer, le Haut Conseil de Santé Publique (HSCP) ayant donné un avis favorable pour abaisser cette valeur à 100 Bq/m3.

Double flux et vide-sanitaire

Malgré tout, les solutions existent. Et elles sont simples. D'abord, la ventilation, avec l'installation d'une VMC double flux. "Il faut générer une surpression au cœur du bâtiment afin de régénérer l'air intérieur", précise Suzanne Déoux. L'autre solution, c'est le vide-sanitaire, qui créer une dépression du soubassement et permet d'évacuer le gaz. Enfin, le contrôle de l'étanchéité des systèmes de ventilation devrait être mieux opéré. "60% des systèmes de ventilation ne sont pas conformes à la livraison", assène la présidente de Bâtiment Santé Plus.

 

Radon solutions techniques
Radon solutions techniques © IRSN

 

*5e Défis Bâtiment Santé, Centre des Congrès - Cité des Sciences et de l'Industrie, 2 juin 2015

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