ENTRETIEN EXCLUSIF. Marjolaine Meynier-Millefert, co-animatrice du Plan de rénovation énergétique de l'habitat, s'exprime dans Batiactu sur la qualité de l'air intérieur des bâtiments à l'occasion de la Journée nationale de la qualité de l'air 2018. Pour elle, les travaux d'amélioration ont un double intérêt, à la fois énergétique mais également sociétal.

Ce mercredi 19 septembre 2018 était la 4e Journée nationale de la qualité de l'air. L'occasion de sensibiliser les citoyens français à l'importance de conserver une atmosphère pure et saine. Marjolaine Meynier-Millefert, co-animatrice du Plan de rénovation énergétique de l'habitat, partage ses réflexions avec Batiactu : "La qualité de l'air, jusqu'à présent, était surtout l'air extérieur". La députée de l'Isère évoque notamment les problématiques rencontrées dans la vallée de l'Arve, où des pics de pollution aux particules sont enregistrés, non seulement en raison de la circulation de poids lourds mais également en raison du chauffage individuel au bois. L'élue reprend : "Mais s'il existe des alertes pour la pollution atmosphérique il n'y a, en revanche, pas d'indicateur pour l'air intérieur".

 

 

S'inquiéter davantage de la ventilation

 

En effet, il reste difficile de suivre la qualité de l'air dans les espaces publics, dans les logements et les bâtiments privés. "Or, on passe 80 % de notre temps dans des lieux clos", martèle la députée qui estime que le sujet devrait être beaucoup plus abordé. Elle rappelle des chiffres édifiants : "Chaque année, il y a 20.000 décès liés à une mauvaise qualité de l'air intérieur et le nombre de pathologies respiratoires est en hausse constante. Tout cela a un coût pour la société, de l'ordre de 19 milliards d'euros par an ! Un montant à mettre en perspective avec l'enveloppe allouée au Plan de rénovation qui est de 14 milliards. Il y a donc des choses à faire". Marjolaine Meynier-Millefert cite l'exemple de pays de l'Union européenne où la Sécurité sociale participe au financement de travaux de rénovation énergétique. "Au Royaume-Uni, on constate un ratio de 1:1 entre les montants investis dans les travaux d'amélioration et les dépensés de santé évitées", poursuit-elle.

 

Pour la co-animatrice du Plan, le financement des réhabilitations de passoires thermiques serait donc partiellement - voire totalement - compensé par les économies réalisées non seulement en matière d'énergie mais également de soins. "Ce n'est pas un investissement à perte et je souhaite en convaincre le gouvernement", nous dévoile-t-elle. Certes, depuis le début de l'année, il y a une obligation de suivi de la qualité de l'air intérieur des crèches et écoles maternelles, qui sera progressivement étendue à d'autres bâtiments d'accueil des enfants en 2020, puis à tous les établissements d'enseignement en 2023. Mais pour l'heure, rien dans les logements particuliers. Marjolaine Meynier-Millefert reprend : "Ne cloisonnons pas les sujets. Lorsqu'on entreprend une rénovation énergétique, il faut également prendre en compte la ventilation et la qualité de l'air intérieur. Nous nous adressons au même public. Il faut donc leur parler de gestes qui seront bons pour leur santé". La députée cite des mesures de bon sens : aérer chaque jour pendant 10 minutes "tout en pensant à couper le chauffage", ne pas boucher les aérations, vérifier au moyen d'une simple feuille de papier que les extracteurs d'air fonctionnent bien… "Les bâtiments sains durent plus longtemps", ajoute-t-elle.

 

 

Une mission pour étudier tous les impacts socio-économiques des rénovations

 

L'élue de La République en Marche souhaite désormais mener une mission de synthèse sur tous les effets indirects des rénovations thermiques, qu'ils soient bénéfiques la santé, sur l'insertion professionnelle ou tous les autres sujets liés au logement. "C'est la base de la pyramide de Maslow", rappelle-t-elle, avant d'énumérer tous les avantages d'un habitat de meilleure qualité : "En changeant les vitrages pour s'isoler d'une route bruyante, on gagne en sommeil. Cela a un impact sur la concentration des enfants à l'école et sur leurs résultats scolaires. Avec un meilleur éclairage on constate une baisse du nombre de dépressions. Je souhaite travailler de manière très large sur toutes les liaisons entre habitat et santé". Car, dans la perspective des discussions autour du projet de loi de finances, les arbitrages s'annoncent difficiles et la co-animatrice du Plan de rénovation veut s'assurer du soutien de certains ministères, dont celui de la Santé, en s'appuyant sur de vrais arguments. Elle entend s'inscrire dans la continuité de la campagne de communication du programme "Faire", lancée sur les ondes depuis la rentrée, où l'on aperçoit des logements humides, froids ou mal ventilés. "Ce sont des vidéos ludiques mais il y a de vrais enjeux derrière", conclut Marjolaine Meynier-Millefert, plus décidée que jamais à faire valoir l'intérêt de la chasse aux épaves énergétiques et autres passoires thermiques.

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