DEBAT. Lors d'un débat aux Assises du logement, le 15 novembre dernier, la sénatrice (LR) et rapporteure du projet de loi Dominique Estrosi-Sassonne et François Bertière, président de Bouygues Immobilier ont partagé leur crainte que la loi Elan impacte peu la libération du foncier, élément indissociable du "choc d'offre" promis par Emmanuel Macron.

De leurs expériences respectives au service du logement, François Bertière et Dominique Estrosi-Sassonne tirent le même constat : la loi Elan ne sera pas un tsunami dans le secteur du logement. Pour sa rapporteure (LR) au Sénat, le texte législatif " ne sera une pas une loi forte en matière de mobilisation du foncier " malgré " quelques mesures purement techniques ". Le président de Bouygues Immobilier, quant à lui, avoue qu'il en est à un énième espoir avorté de "révolution" .

 

Certaines des mesures jugées timides par Dominique Estrosi-Sassonne lèvent néanmoins des freins à la production de logements, comme les critères d'application de la décote en cas de cession du domaine privé de l'Etat ou les recours contentieux. "Fléau", "plaie", les deux intervenants n'ont pas assez de mots pour qualifier les " recours abusifs " qu'ils ont en horreur, et principal point d'avancée de la loi Elan.

 

Le texte a en effet pour objet de limiter l'impact des recours sur la livraison de logements, en raccourcissant les délais de jugement et en mettant fin au dépôt au compte-goutte d'arguments pour un recours contentieux, ce qui avait pour effet de retarder les procédures. Dominique Estrosi-Sassonne note également en ce sens, " l'obligation pour une association requérante d'attester d'une existence minimale, afin d'éviter les recours opportunistes ".

 

Elus bâtisseurs

 

Mais pour Mme Estrosi-Sassonne et M.Bertière, la cheville ouvrière d'une relance de la construction de logements se trouve dans la libération et la mobilisation de foncier. Pour le président de Bouygues Immobilier, "le nœud du problème se trouve dans l'idée que l'on ne produit pas de densité sur les terrains à bâtir". Une densité parfois difficile à assumer par un élu auprès de ses administrés, et qui aurait pu être traitée par la loi Elan " en prévoyant des mesures incitatives qui permettent de faire d'un maire, un élu bâtisseur ".

 

S'en remettant à l'Etat, François Bertière regrette jusqu'à présent " un vrai problème à mobiliser son foncier public. Force est de constater que ça ne marche pas très bien ". Il pointe notamment " le laps de temps non négligeable entre le moment où le terrain passe des mains de l'Etat aux collectivités locales, puis aux opérateurs avant de se traduire en logement" . Et de citer en exemple une opération menée sur des terrains militaires à Issy-les-Moulineaux, "où Bouygues Immobilier avait été nommée lauréat en 2000, avait pu maîtriser le terrain en 2010, et livré les logements en 2014".

 

Pour la sénatrice des Alpes-Maritimes, le problème n'est pas tant la cherté que la rareté du foncier public. Alors que la loi Duflot I de 2013 devait faciliter le recours aux propriétés publiques pour la création de logements sociaux, Dominique Estrosi-Sassonne estime que le texte législatif " n'a pas produit les effets escomptés ". Une réelle mobilisation foncière passe, selon elle, "par une réforme fiscale en commençant par une baisse de l'imposition sur les plus-values" mais également "un dialogue entre Etat, collectivités locales et professionnelles afin d'anticiper les projets à mener sur les cessions de l'Etat" .

 

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