TECHNOLOGIES. A l'heure où l'intelligence artificielle connaît un développement tous azimuts et où la transition énergétique se traduit en politiques publiques incontournables, Engie a organisé un débat sur le sujet pour mieux cerner les enjeux. Etienne Gehain, responsable de l'innovation digitale chez l'énergéticien, apporte des précisions à Batiactu.

Ce mardi 22 janvier, Engie organisait à Paris un débat rassemblant plusieurs personnalités autour du thème : "Intelligence artificielle (IA) : où en sommes-nous ?". Les échanges ont donc porté sur les origines, les problématiques et les enjeux des technologies d'IA, dont la définition la plus courante est la suivante : "La science de l'IA a pour but de faire accomplir à une machine les tâches qui seraient autrement accomplies par une intelligence humaine". A l'heure des données de masse, de l'hyper-connectivité des appareils et des défis de transition énergétique auxquels sont confrontés bon nombre de secteurs d'activité, l'IA peut-elle réellement apporter des solutions fiables et pérennes ? Contacté par Batiactu, Etienne Gehain, responsable de l'innovation digitale chez Engie, tente d'apporter des éléments de réponse : "Aujourd'hui, on ne peut plus rien faire qui ne soit plus 'intelligent', c'est une réalité. La collecte des données rencontre des problèmes dus à des systèmes de plus en plus complexes. On ne modélise plus, car on est passé à une autre méthode : maintenant, des réseaux de neurones reconstituent des données d'ensemble, des algorithmes permettant de créer leur propre modèle. Au lieu de faire de la programmation, on fait de l'apprentissage."

 

 

Une technologie déjà très répandue...

 

Deux grands facteurs ont contribué, durant la dernière décennie, à développer ces technologies spécifiques : d'une part, les théories d'apprentissage ont franchi une nouvelle étape avec la mutualisation des connaissances et des savoir-faire au sein de communautés définies, grâce à l'open source ; d'autre part, la "loi de Moore" a contribué à rendre les capacités de calcul et de mémoire accessibles pour un coût moins élevé, de manière à déployer les algorithmes. Pour mémoire, cette "loi de Moore" explique que la puissance des matériels informatiques est inéluctablement exponentielle. Aujourd'hui, les applications les plus concrètes et les plus abouties de l'IA se traduisent déjà dans notre vie quotidienne : le smartphone, littéralement "téléphone intelligent", en est le meilleur exemple, avec ses capacités de géolocalisation, de saisie intuitive ou d'assistance vocale. "L'IA est au croisement de plusieurs disciplines, dont les mathématiques et l'informatique, et ce sont deux sujets sur lesquels on est très bon en France", confirme Alexia Audevart, scientifique des données et fondatrice de Datactik.

 

...mais qui soulève des questions

 

Mais plus largement, la plupart des secteurs d'activité de notre économie ont recours à l'IA : jeux vidéo, assistance au diagnostic médical, systèmes industriels prédictifs, recherche sémantique sur les moteurs de recherches, logiciels de traduction, reconnaissance faciale... sont autant d'exemples d'applications dites "matures". Ceci dit, ces technologies novatrices aux multiples opportunités laissent entrevoir des limites, voire des risques quant à l'utilisation même de l'IA. C'est alors que la philosophie, la politique et le droit, par le prisme de l'éthique, interviennent dans ce dossier pour le moins complexe. Des questions fondamentales se posent, par rapport à la conscience de ces technologies, de leur libre-arbitre et de leur intuition. C'est pourquoi les pouvoirs publics et certains acteurs privés se sont saisis du sujet en anticipant ces débats : "De nombreuses initiatives pour l'IA ont été lancées en France : France IA, le rapport de Cédric Villani [député LREM de l'Essonne et premier vice-président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, ndlr], l'implantation de laboratoires et les initiatives 3IA [Instituts interdisciplinaires d'intelligence artificielle, ndlr] à Grenoble, Nice, Paris et Toulouse", poursuit Alexia Audevart.

 

IA et transition énergétique, duo gagnant ?

 

Et qu'en est-il de la transition énergétique ? Ce sujet est devenu incontournable dans nos économies post-industrielles et nos sociétés consuméristes, et il peut lui aussi bénéficier des apports de l'IA. Engie fournit quelques exemples de technologies intelligentes qui augmentent les capacités de gestion et d'optimisation : surveillance des installations de production d'énergie renouvelable, cartographie thermique des bâtiments, détection des "points chauds" sur les panneaux photovoltaïques ou des fissures sur les éoliennes, contrôle intelligent de thermostat, prédiction de la consommation par site... De l'efficacité opérationnelle à la maintenance prédictive, les opportunités ne manquent donc pas. "L'apprentissage permet notamment la prédiction de production d'énergie renouvelable et la détection de problèmes", reprend Etienne Gehain. "Il s'agit de laisser le système construire son propre modèle, de permettre au client de maximiser son auto-consommation en assurant une meilleure programmation des équipements électriques de la maison. Mais cette optimisation des consommations énergétiques concerne non seulement les particuliers mais également les collectivités territoriales et les entreprises. En fait, la prédiction a toujours été un art plus qu'une science, mais aujourd'hui, l'IA nous aide à en faire plus une science qu'un art."

 

"On assiste donc à une accélération des traitements, par rapport à ce qu'un homme serait capable de prodiguer comme traitement. L'IA est utilisée progressivement, de plus en plus, au travers des différentes plateformes digitales qu'Engie développe pour ses produits et services. Ces technologies nous permettent de recouper plus facilement les informations et, dans le domaine de la transition énergétique, qui suggère des productions renouvelables et donc moins prévisibles, l'IA vient compenser cette moindre prévisibilité."

 

A ce sujet, l'énergéticien met en avant les nombreuses optimisations rendues possibles, comme la consommation d'énergie avec des compteurs intelligents et des thermostats connectés, ou la mobilité "propre" avec le stockage et la recharge des véhicules électriques. Dans les usines et bâtiments tertiaires, les fluides (électricité, gaz, eau...) peuvent également bénéficier de ces optimisations, tout comme les villes intelligentes peuvent voir leurs systèmes d'eau et d'éclairage améliorés, de même que leurs réseaux de transports et leurs services de sécurité. Globalement, ce sont donc les phases de production et de distribution d'énergie qui peuvent ainsi être optimisées. "L'identification des défauts et l'adaptation des équipements est rendue possible grâce à la détection en temps réel, et le fait de garantir une maintenance prédictive nous permet d'entraîner nos systèmes à repérer les éventuelles défaillances", souligne Etienne Gehain. "On assiste donc à une accélération des traitements, par rapport à ce qu'un homme serait capable de prodiguer comme traitement. L'IA est utilisée progressivement, de plus en plus, au travers des différentes plateformes digitales qu'Engie développe pour ses produits et services. Ces technologies nous permettent de recouper plus facilement les informations et, dans le domaine de la transition énergétique, qui suggère des productions renouvelables et donc moins prévisibles, l'IA vient compenser cette moindre prévisibilité."

 

 

"L'IA est plus efficace en écosystème que seule"

 

D'autant que la collaboration de grands groupes comme Engie avec de jeunes pousses, ainsi qu'avec des laboratoires et centres de recherches dédiés à l'IA, promet de nouvelles opportunités : "L'IA est plus efficace en écosystème que seule", confirme le responsable. "Chez Engie, on cherche à se différencier en étant le meilleur utilisateur de la technologie, pas forcément son propriétaire. Nous la mettons à disposition de nos partenaires, afin que tout le monde bénéficie d'outils enrichis. De plus, nous investissons dans certaines jeunes pousses pour rester compétitifs, le but étant de faire le meilleur usage possible de l'IA pour rester pertinents, d'élargir notre horizon dans un environnement dynamique. La collaboration crée toujours plus de valeur que la somme des créations individuelles."

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