RÉSEAUX. La France, l'Espagne et le Portugal construiront une ligne sous-marine à très haute tension sous le golfe de Gascogne, afin de relier leurs réseaux électriques et augmenter leurs capacités d'échanges. Le projet verra le jour en 2025.

La France et l'Espagne avaient déjà doublé leurs capacités d'échange de courant électrique en 2015, avec l'inauguration d'une liaison sous les Pyrénées qui permettait de dépasser les 2.000 MW. Mais Madrid et Lisbonne souhaitaient encore réduire l'isolement de leur péninsule, à l'extrémité ouest du continent européen, afin de pouvoir exporter plus facilement de l'électricité d'origine renouvelable vers le reste de l'Union. La construction d'une nouvelle connexion, cette fois sous-marine, dans le golfe de Gascogne portera ces capacités transfrontalières à 5.000 MW.

 

Le premier ministre portugais, Antonio Costa, a sobrement déclaré : "C'est un pas très important". Techniquement, les câbles sous-marins s'étireront sur 370 km et seront opérationnels en 2025. Le projet sera subventionné à hauteur de 30 % par l'Union Européenne, qui apportera 578 M€, un montant très important pour ce type d'infrastructure. La Commission européenne souhaite en effet que les interconnexions se développent afin que les pays européens puissent plus facilement vendre et acheter du courant électrique et stabiliser ainsi leurs propres réseaux. Le dirigeant portugais ajoute : "La durabilité de notre stratégie d'investissement dans les énergies renouvelables passe par l'exportation". Le petit pays dispose en effet parfois d'un excédent de production électrique qui pourrait constituer une précieuse ressource.

 

Il n'y a pas que l'électricité dans la vie, il y a le gaz aussi

 

Au-delà de la seule électricité, les deux pays ibériques entendent également participer au marché européen du gaz et imaginent créer un gazoduc vers la France, cette fois du côté de la Catalogne. Les deux pays disposent en effet de sept terminaux de regazéification du gaz naturel liquéfié, qu'ils importent du Qatar et des Etats-Unis, et ils argumentent qu'une interconnexion avec le reste de l'Europe permettrait de réduire la dépendance au gaz russe. Mais le projet, nommé "MidCat" (pour Midi-Catalunya), rencontre le scepticisme au niveau français et européen. Le président Emmanuel Macron a notamment reconnu que le pays s'est déjà opposé à des projets d'interconnexion dont elle "n'avait pas été convaincue de l'utilité". Une étude indépendante, commandée par la Commission européenne et publiée en avril 2018, démontrait que ce gazoduc d'un coût estimé à plus de 440 M€, ne serait pas rentable, l'Europe disposant déjà de nombreux autres terminaux de regazéification sous-exploités. En juillet 2016 déjà, le vice-président de la Commission européenne de l'énergie, Maros Sefcovic, déclarait dans les colonnes des Echos : "Il est important de ne pas investir dans des infrastructures qui seront sous-utilisées. (…) Il apparaît qu'à l'horizon 2030, l'Europe consommera à peu près autant de gaz qu'aujourd'hui…".

 

La France n'a toutefois pas totalement fermé la porte, puisque le président de la République a ajouté que si la fermeture annoncée des centrales à charbon entraînait une hausse de la demande de gaz et que l'exploitation de MidCat avait "du sens économique" alors "nous le ferons". Un projet alternatif allégé, nommé "STEP" (South Transit East Pyrénées), d'une capacité moindre et suivant le même trajet de 224 km entre Barcelone et Carcassonne, a été proposé.

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