La Jordanie annonce avoir choisi cinq consortiums internationaux pour la réalisation de la première phase du chantier du canal des deux mers, reliant la mer Rouge à la mer Morte, dont le niveau ne cesse de diminuer. Le début des travaux est prévu pour 2018.

Afin de stopper l'assèchement de la mer Morte - qui a perdu 27 mètres de profondeur dans les quarante dernières années - les gouvernements jordaniens et israéliens ont mis sur pied un projet de canal devant alimenter la mer Morte grâce aux eaux de la mer Rouge. Ce canal, d'une longueur de 180 kilomètres (dont 134 couverts), ne se limitera pas à être une simple conduite gravitaire entre le niveau 0 du golfe d'Aqaba et le niveau -427 mètres de la mer Morte, mais il constitue un véritable projet d'infrastructure avec réservoir et installations de production d'énergie.

 

La première phase, prévue pour démarrer au début de 2018, consiste à construire une station de pompage sur la mer Rouge, d'une capacité de 300 millions de mètres cubes par an, ainsi qu'une usine de dessalement, d'une capacité de 65 à 85 millions m3/an, pour un montant de 1,1 milliard d'euros. Une concession de 25 ans sera accordée pour l'exploitation de ces installations. Le ministère jordanien de l'Eau et de l'Irrigation a indiqué que les cinq consortiums choisis comprenaient une vingtaine d'entreprises spécialisées venant de France, Chine, Singapour, Canada, Italie, Japon, Corée du Sud et Espagne.


Alimenter les trois pays riverains en eau potable et électricité

 

A terme, il est prévu que ces capacités soient revues à la hausse : en décembre 2015, lors de la signature entre Israël et la Jordanie du lancement conjoint de l'appel d'offres, il était avancé que 2 milliards de m3 d'eau de mer seraient pompés à Aqaba, dont 1,2 milliard seraient injectés dans la mer Morte et 800 millions d'autres dessalés pour être utilisés dans les deux pays concernés. Une partie (30 millions de m3) serait même revendue à l'autorité palestinienne pour alimenter la Cisjordanie. En 2012, la Jordanie avait évalué qu'elle aurait besoin de 1,6 milliard de m3 d'eau potable chaque année, pour faire face à ses besoins, alors qu'elle n'accueillait pas encore de dizaines de milliers de réfugiés syriens (pour une population totale de 7 millions d'habitants).

 

Le projet de canal suscite toutefois des interrogations. Au-delà du tracé, plus long qu'un autre projet envisagé dès le 19e siècle, qui prévoyait de relier la mer Morte à la Méditerranée distante de seulement 80 km, c'est l'impact environnemental qui inquiète les associations. Certaines estiment que l'apport d'eau de mer d'une composition différente de l'eau du Jourdain, qui alimentait normalement le lac salé jusqu'à sa surexploitation dans les années 1960, risque de mettre en péril l'équilibre écologique des lieux. D'autres associations font valoir que l'exploitation de l'infrastructure constituera une aubaine pour des multinationales peu scrupuleuses. Cependant, des spécialistes ont calculé qui si rien n'était fait, au rythme actuel d'assèchement (1 mètre par an), la mer Morte le sera totalement en 2050.

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