Si la France salue les propositions de réforme de la directive de 1996, annoncées officiellement ce mardi, comme le principe « à travail égal, salaire égal » sur un même lieu de travail, elle demande toutefois que cette révision s'accompagne d'une autre sur la coordination des systèmes de sécurité sociale. Détails.

Pas de véritable surprise à la présentation de la réforme de la directive sur le détachement des travailleurs, à Bruxelles ce mardi 8 mars 2016. Comme annoncé hier, les principales mesures portent sur trois grands domaines : la rémunération des travailleurs détachés, y compris dans les situations de sous-traitance, les règles sur les travailleurs intérimaires, et le détachement à long terme.

 

Le principe d'une rémunération équitable

 

Tout d'abord, le principe « à travail égal, salaire égal », qui promeut le principe d'une rémunération identique pour un même travail effectué au même endroit. « Plus spécifiquement, l'initiative a pour but de garantir des conditions de rémunérations équitables et des conditions de concurrence égales tant pour les entreprises détachant des travailleurs que pour les entreprises locales dans le pays d'accueil », souligne la Commission européenne dans un communiqué. Actuellement, les travailleurs détachés sont déjà soumis aux mêmes règles que les travailleurs de l'Etat membre d'accueil dans certains domaines, mais l'employeur n'est pas tenu de leur verser plus que le salaire minimum fixé par le pays d'accueil. Conséquence : des écarts salariaux entre travailleurs peuvent apparaître et se traduire par une concurrence déloyale entre entreprises.

 

Désormais, la rémunération devra comprendre non seulement les taux de salaire minimal, mais aussi d'autres éléments tels que les primes ou les indemnités le cas échéant. Les Etats membres devront aussi préciser « de façon transparente » les différents éléments constitutifs de la rémunération sur leur territoire, indique la Commission. Enfin, ce principe donne la possibilité aux Etats membres de prévoir que les sous-traitants doivent accorder à leurs travailleurs la même rémunération que le contractant principal.

 

Un cadre juridique consolidé

 

Il s'agit, selon le ministère du Travail en France, des « premières pierres d'une consolidation du cadre juridique ». Des propos qui renchérissent ceux de Marianne Thyssen, commissaire européen pour l'emploi : « (…) La proposition d'aujourd'hui créera un cadre juridique clair, équitable et facile à appliquer en matière de détachement ».

 

En outre, la révision de la directive garantira que la réglementation nationale concernant le travail intérimaire s'applique lorsque des entreprises de travail intérimaire établies à l'étranger détachent des travailleurs. Une mesure qu'approuve également le gouvernement français.

 

De même qu'il se réjouit que le texte donne la possibilité d'obliger à un maître d'ouvrage ou un donneur d'ordre à ne contracter qu'avec des sous-traitants garantissant à leurs travailleurs des conditions de rémunération conformes aux dispositions légales et conventionnelles.

 

Quant à la durée du détachement limité à 24 mois, le ministère de Myriam El Khomri salue « la volonté de mieux affirmer le caractère temporaire du détachement ». En cas de dépassement, précise la Commission européenne, « les conditions prévues par la législation du travail des Etats membres d'accueil devront être appliquées, lorsqu'elles sont favorables au travailleur détaché ».

 

Peut mieux faire ?

 

Cette révision suffira-t-elle à endiguer le phénomène de concurrence déloyale ? Certes, ces mesures vont dans le bon sens, estime la France, qui réclame depuis longtemps une révision du texte, mais elle indique qu'elle continuera de porter, en parallèle, d'autres propositions : interdiction du détachement en cascade des salariés intérimaires, mesures pour lutter contre les entreprises 'boîtes aux lettres', augmentation des garanties des salariés détachés, renforcement de la coopération européenne en matière de lutte contre les fraudes au détachement. Surtout, elle souhaite que cette révision s'accompagne « de la révision du règlement 884/2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, notamment pour renforcer l'encadrement juridique du détachement ».

 

Un premier pas donc vers une modification profonde des règles du détachement ?

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