DECRYPTAGE. La suppression du RSI, annoncée pour janvier 2018, semble être la solution idéale pour en finir avec les problèmes rencontrés par les indépendants. Mais est-ce vraiment le cas ? De nombreux acteurs et usagers en doutent, et le font savoir.

Est-ce que la suppression du RSI supprimera tous les motifs de mécontentement liés à ce régime ? Pour l'instant, rien n'est moins sûr. Alors qu'une mission de préparation de la réforme du dispositif a été lancée récemment, dans le but d'adosser le RSI au régime général en janvier 2018, nombreux sont ceux à exprimer des doutes.

 

"Ce régime n'a pas que des défauts"

 

"Malgré ses dysfonctionnements certains et préjudiciables aux affiliées, ce régime n'a pas que des défauts", peut-on ainsi lire sur le site de le la fondation libérale Ifrap, peu suspecte de souhaiter aller à l'encontre des intérêts des entrepreneurs. "Des différents rapports réalisés sur le sujet, aucun ne conseille sa suppression, la plupart invitent à une refonte en profondeur." La fusion du RSI avec le régime général représenterait même, pour l'Ifrap, un "risque".

 

Patrick Liébus, président de la Capeb, signalait d'ailleurs récemment qu'il ne voulait pas revivre, en 2018, "ce qui s'était passé en 2008". Bernard Delran, vice-président du RSI a pour sa part prévenu le pouvoirs publics : "Il ne faut pas remettre en cause les efforts qui ont été faits ces dernières années." En d'autres termes, il ne faut pas que la disparition du RSI, par sa fusion avec un autre organisme, nous ramène au point zéro.

 

Réduire le taux de cotisation à 35,6%

 

Pour rappel, le RSI est né de la fusion de trois caisses de protection sociale des chefs d'entreprise, et c'est cette fusion qui est à l'origine de la plupart de ses dysfonctionnements ultérieurs. Ainsi, fusion ne rime pas systématiquement avec "simplification" ou "amélioration". Pour l'Ifrap, la marche à suivre serait plutôt celle d'une réforme "ambitieuse". Elle passerait notamment par une réduction du taux de cotisation à 35,6% (taux normal) ou 34,5% (taux réduit), avec un taux marginal à 18%.

 

Hervé Le Roch, commerçant et président du Collectif des indépendants de France, fédération ouvertement "anti-RSI" fondée en mai 2017, estime également que le taux devrait être abaissé aux environs de 35% (plutôt que 47% actuellement). L'indépendant n'est absolument pas rassuré par l'annonce de la suppression du RSI. "Ce n'est pas réellement une suppression : on change la boîte, mais le contenu reste le même", affirme-t-il à Batiactu. "Nous aurons les mêmes interlocuteurs en 2018 !"

 

Le RSI, une "catastrophe industrielle", mais aussi "un drame humain"

 

Mais ce que demande Hervé le Roch et son collectif, c'est également de solder les erreurs passées, en créant une commission d'enquête indépendante pour dégager des responsabilités, rendre des comptes et indemniser les indépendants ayant souffert des dysfonctionnements du RSI. "La cour des Comptes avait affirmé que la mise en place du RSI était une catastrophe industrielle, et j'ajoute que c'est aussi un drame humain", estime-t-il. Aujourd'hui, l'indépendant espère peser dans les décisions liées à la réforme du RSI, d'où la création du collectif.

 


"Quand c'est bien géré, le RSI, ça marche !", Olivier Bertrand, expert-comptable

 

"Le fonctionnement du RSI s'est nettement amélioré ces dernières années", affirme à Batiactu Olivier Bertrand, expert-comptable, dirigeant du cabinet Soludex basé à Toulouse. Il a traité des centaines de dossiers d'indépendants affiliés au RSI, et s'inquiète de ce qui résultera de la suppression du RSI en janvier prochain. Car, comme il l'affirme, "quand c'est bien géré, le RSI, ça marche !". "Contrairement aux premières années, il y a moins d'erreurs dans le calcul des cotisations, et les réponses viennent plus rapidement. Les experts-comptables peuvent créer un compte sur le site du RSI, ce qui simplifie grandement le suivi des affaires. Par ailleurs, nos interlocuteurs sont des personnes mieux formées."

 

Selon Olivier Bertrand, si le RSI a pu faire tant de mal, c'est en partie dû au fait que des indépendants ne sont pas assez bien informés de son fonctionnement. "Il arrive fréquemment qu'un indépendant augmente son revenu d'une année sur l'autre, que ce soit son bénéfice fiscal pour l'entrepreneur individuel ou la rémunération pour le gérant de SARL. Or, dans la mesure où le RSI base ses appels de cotisations sur l'année antérieure, cette situation peut engendrer de fortes régularisations et donc de grosses fluctuations de trésorerie", nous explique-t-il. "D'où l'intérêt de suivre le dossier pour les experts comptables et d'adopter un comportement préventif auprès des clients."

 

Le spécialiste confirme par ailleurs que les dysfonctionnements ont pu donner lieu à des drames humains, notamment des suicides. "Au début, les déclarations de revenu se faisaient sur papier", explique Olivier Bertrand. "Or, certains courriers s'égaraient dans les services du RSI. Celui-ci considérait alors que le cotisant ne déclarait pas son revenu. Au bout de plusieurs relances, il le taxait d'office, au taux maximal. Et la machine se mettait en route, avec huissiers et mises en demeure."

 

Aujourd'hui, nombreux sont les indépendants qui veulent quitter le RSI. Mais pas forcément pour de bonnes raisons. "Ils optent souvent pour le statut de SAS. J'ai, pour ma part, transformé plusieurs SAS en SARL afin que l'exploitant bénéficie du RSI et du taux de 47%. Le président de SAS, lui, a un taux de cotisation qui s'élève à prés de 75%."

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