Le Laboratoire aérodynamique Eiffel d'Auteuil (Paris 16e) a 100 ans. Conçue par l'illustre ingénieur Gustave Eiffel en 1912, cette soufflerie classée monument historique est restée en activité. Elle demeure un outil scientifique déterminant dans plusieurs domaines d'expertise tels que l'architecture, l'urbanisme climatique, le génie civil ou l'aéraulique industrielle. Zoom.

Inaugurée le 19 mars 1912 (un mois avant le naufrage du Titanic), la soufflerie d'Auteuil a permis à Gustave Eiffel de poursuivre ses travaux sur la résistance de l'air puis sur l'aérodynamique, entrepris dès 1903. A l'époque déjà, l'équipement est à la pointe de la technologie : outre des essais sur les profils d'ailes et d'hélices d'avions, le père de la « Tour de 300 mètres » a rapidement mené des travaux sur des maquettes de bâtiments afin d'observer les effets du vent (hangars d'aviation notamment). Dès lors, le laboratoire aérodynamique participera à de nombreuses études, campagnes d'essais, expérimentations et recherches dans de nombreux domaines d'excellence liés à la construction : architecture et urbanisme climatique, ventilation naturelle, environnement, aéraulique industrielle, génie civil et tenue au vent des ouvrages, etc.

 

Outil de travail du CSTB
Construite en bois et toile (comme les ailes d'avions de 1912), la soufflerie est pourtant toujours d'actualité de nos jours, grâce à des systèmes de mesure complémentaires qui ont, eux, beaucoup évolué au cours des décennies. Adaptée aux grandes évolutions techniques, l'installation est depuis 2001 la propriété du CSTB (Centre Scientifique et Technique du Bâtiment) qui, après chargé l'architecte François Pélegrin de sa réhabilitation, continue de l'utiliser. Elle permet à l'organisme de proposer des interventions, notamment pour le compte du département CAPE (Climatologie, aérodynamique, pollution, épuration), en réalisant des études pour la conception de bâtiments, de quartiers ou de villes durables ou pour la vérification expérimentale de données obtenues par simulation numérique. La soufflerie collabore également avec le LABE (Laboratoire Européen d'Acoustique du Bâtiment) afin de mesurer des bruits aéro-acoustiques.

 

Ainsi,« cet instrument scientifique chargé d'histoire, demeure plus que jamais en activité », déclare Bertrand Delcambre, le président du CSTB. Malgré ses 100 ans, le Laboratoire aérodynamique offre encore de belles perspectives de développement : notamment grâce à l'arrivée de nouveaux outils de mesure (visualisation physique pour les maquettes d'architecture pour le vent et les champs de vitesse), outils de simulation d'exposition solaire (ombre portée et flux). La soufflerie Eiffel continue donc d'apporter une contribution scientifique déterminante dans de nombreux domaines : un motif de fierté pour son créateur qui avait voulu vaincre le vent.

 

Soufflerie Eiffel :
Localisation : Auteuil, Paris 16e ;
Diamètre : 2 mètres de diamètre sur 2,37 m de long (dimension de la veine non-guidée où sont placées les maquettes) ;
Longueur de l'installation : 16 mètres ;
Vitesse du vent : de 0 à 30 m/s (110 km/h) ;
Taux de turbulence : 1 à 2 % ;
Niveaux de pression globaux : de 43 à 82 dB(A) ;
Equipements : 96 capteurs de pression synchrones, balance dynamométrique 6 composantes synchrones, banc aéraulique, analyseur de gaz (CO2 ou éthane), thermocouple, anémomètre à fil chaud, générateur de fumée, enduit gras de visualisation pariétale, etc.

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Bâtiment historique

Soufflerie Eiffel
Soufflerie Eiffel © G. Noble - Batiactu
Inaugurée en mars 1912, la soufflerie est née de la volonté de Gustave Eiffel de poursuivre ses travaux sur la résistance de l'air, débutés dès 1892. Les expérimentations consistaient alors à lâcher des objets de formes géométriques diverses depuis le 2e étage de la tour Eiffel. Entre 1903 et 1906, l'ingénieur réalise des essais aérodynamiques et renverse la problématique : il souhaite appliquer du vent (un flux d'air) sur des maquettes et étudier ses effets.
En 1909, Eiffel construit une première soufflerie sur le Champ de Mars. L'édifice, jugé disgrâcieux par la mairie de Paris, est détruit en 1911. Convaincu du potentiel de ses travaux pour l'industrie aéronautique alors en plein essor, Gustave Eiffel construit un nouveau laboratoire à Auteuil.

Maquette

Soufflerie eiffel
Soufflerie eiffel © G. Noble - Batiactu
Une maquette de la soufflerie qui reprend les éléments de l'équipement original : un collecteur en bois, une veine non-guidée, un diffuseur à la sortie de la chambre d'expérience et un ventilateur destiné à générer le flux d'air.

La grille du Collecteur

Soufflerie Eiffel
Soufflerie Eiffel © G. Noble - Batiactu
L'impressionnante grille du collecteur, de 4 mètres de diamètre à l'entrée et 2 mètres de diamètre du côté de la chambre d'expérience.

Un ventilateur de 4 m de diamètre

Soufflerie Eiffel
Soufflerie Eiffel © G. Noble - Batiactu
Le ventilateur de 4 mètres de diamètre muni de 23 pales. Il pèse 7 tonnes et permet de générer des vents de 0 à 30 m/seconde (110 km/h).

Arrière de l'installation

Soufflerie Eiffel
Soufflerie Eiffel © G. Noble - Batiactu
L'arrière de l'installation : on distingue le diffuseur de forme évasée (2 mètres de diamètre à la sortie de la chambre d'expérience, 4 mètres au ventilateur) réalisé en bois entoilé, comme les aéroplanes de l'époque.

Panneau de commandes

Soufflerie Eiffel
Soufflerie Eiffel © G. Noble - Batiactu
Le panneaux de commandes d'époque : les instruments sont insérés sur une console en marbre.

Stade de la Licorne

Soufflerie Eiffel
Soufflerie Eiffel © G. Noble - Batiactu
Dès 1950, les maquettes en soufflerie sont utilisées pour comprendre et intervenir sur les écoulements d'air autour des masses bâties. En effet, le confort au sol des ouvrages de grandes dimensions (IGH, stades) est une problématique nouvelle à l'époque. Des études seront ainsi menées au Laboratoire Aérodynamique lors de la construction du CNIT de La Défense (1958) ou du stade olympique de Montréal (1973).
La maquette représentée sur le cliché est celle du stade de la Licorne (Amiens).

Musée des Eaux douces (La Réunion)

Soufflerie Eiffel
Soufflerie Eiffel © G. Noble - Batiactu
La maquette du Musée des eaux douces à l'Etang Salé pour la région Réunion. Les études menées ont aidé à concevoir une ventilation naturelle des bâtiments, décollés d'un mètre au-dessus d'un plan d'eau. Les ingénieurs ont développé un confort thermique efficace grâce à des courants d'irrigation traversants (ouvertures et ouies en façades) qui sont extraits par un puits en faîtage. Un plancher en caillebottis a été intégré. L'objectif a été de créer un courant d'environ 1 m/s pour que la température ressentie s'abaisse de 4 °C. Le dispositif a été complété par une double peau ventilée destinée à évacuer les charges thermiques des parois (isolation). Le projet a été optimisé afin de fonctionner suivant les brises thermiques de terre ou de mer et les alizés.

Tour Montparnasse (Paris)

Soufflerie Eiffel
Soufflerie Eiffel © G. Noble - Batiactu
La maquette de la terrasse de la tour Montparnasse qui a servi à quantifier les charges dûes au vent sur les vitrages du nouveau belvédère. Par le jeu de prises de pression installées de part et d'autre des parois, la mesure directe du champ de pression instantané par intégration des surfaces a permis de déterminer les forces s'exerçant sur chaque vitrage.

Ville bioclimatique (Libye)

Soufflerie Eiffel
Soufflerie Eiffel © G. Noble - Batiactu
La ville bioclimatique de Sidi Saleh (Libye) a été imaginée par le cabinet Day Architectes. Afin d'assurer une urbanisation aérée et une ventilation naturelle efficace des habitations, des études ont été menées à la soufflerie Eiffel sur trois échelles : plan de masse, îlot et pavillon individuel.
L'objectif a été de garantir une irrigation suffisante des espaces extérieurs et intermédiaires, et de l'espace collectif entre les pavillons de chaque îlot. Afin d'assurer une ventilation naturelle des maisons, un "vent traversant" ou un "effet cheminée" ont été employés.
Grâce aux tests réalisés, les mesures de champs de pression et de vitesse ont permis de valider les choix aérodynamiques et aérauliques aux différentes échelles.

Extracteurs statiques de ventilation naturelle

Soufflerie Eiffel
Soufflerie Eiffel © G. Noble - Batiactu
Il s'agit de dispositifs installés sur les cheminées et qui assurent la protection contre la pluie ainsi que des performances aérauliques et aérodynamiques pour l'évacuation des gaz brûlés ou des flux de ventilation.
L'extracteur a été installé sur un conduit débitant dans la soufflerie afin de vérifier la fonction anti-refouleur et de mesurer les pertes de charge pour différentes incidences du vent relatif et de plusieurs vitesses débitantes dans les conduits.