Annoncé en grandes pompes le 15 janvier par les deux patrons, le projet de fusion entre les industriels français Schneider Electric et Legrand a surmonté en neuf mois une série d'écueils avant de sombrer mercredi. Rappel des principaux faits.

En janvier, le processus du rapprochement est présenté comme une simple formalité par les deux groupes dont les conseils d'administration ont "soutenu et approuvé à l'unanimité" le projet d'offre publique d'échange (OPE) amicale qui devait faire avaler Legrand par Schneider. A l'époque, il ne manquait que le feu vert des autorités de marché pour lancer l'OPE.

Et la réaction de Bruxelles ? Des cessions d'actifs d'une "ampleur limitée" pourraient être exigées par les services européens de la concurrence, reconnaissait tranquillement en janvier le patron de Legrand, François Grappotte. "Nous ferons en sorte que Bruxelles prenne plus en compte le point de vue des clients et des distributeurs que celui de nos concurrents", ajoutait Henri Lachmann, PDG de Schneider, tout aussi sûr de lui.

Mais voilà, le scénario idéal imaginé par les stratèges des deux groupes prend une tournure inquiétante. Très vite, la fusion bute très vite sur la fronde de certains actionnaires de Legrand. Regroupé au sein de l'Association des actionnaires minoritaires (ADAM) dirigée par la bouillonnante Colette Neuville, ces derniers jugent insuffisante la valeur accordée par l'OPE à leurs actions à dividende prioritaire (ADP).

Cette contestation n'empêche pas le Conseil des marchés financiers (CMF) d'autoriser l'OPE le 24 janvier. Opiniâtres, les mécontents portent l'affaire devant la justice.

"Nos services juridiques sont très confiants. Nous pensons que le recours (devant la Cour d'appel de Paris, ndlr) sera rejeté", déclare M. Lachmann début mars. "Le projet d'intégration entre les deux groupes est déjà en place", ajoute-t-il.

Premier coup de théâtre: le 3 mai, la Cour d'appel de Paris annule le feu vert du CMF. Les deux groupes doivent revoir leur copie et proposent le 7 juin un meilleur prix pour les ADP.

L'OPE, initialement prévue du 25 janvier au 28 février, puis du 1er février au 7 mars, se déroule finalement du 21 juin au 25 juillet. Après l'offre, Schneider détient 98,1% du capital de Legrand.

Schneider ne pourra toutefois exercer les droits de vote Legrand qu'il a acquis que s'il dispose de l'autorisation de la Commission européenne qui avait ouvert le 30 mars une enquête approfondie sur le dossier. Début septembre, HenriLachmann se dit "assez serein". Le 18 septembre, après avoir reçu un accord de principe de Bruxelles, il estime "le ciel dégagé". Le futur groupe sera coté en juin à Wall Street, prévoit-il.

Mais le patron de Schneiner avait vraisemblablement pêché par excès d'optimisme, car le 10 octobre, Bruxelles met son veto au projet.
La Commission estime qu'avec 40 à 90% de parts de marché dans les différents pays d'Europe, il y aurait un abus de position dominante, surtout en France, en Espagne, au Danemark, en Grèce, en Italie, au Portugal et au Royaume-Uni.

Que les amateurs de feuilletons à sensation se rassurent, car l'histoire ne risque pas de s'arrêter si tôt. Alors que Schneider annonce déjà qu'il prépare un recours devant la justice européenne, Mario Monti semble faire preuve d'une certaine tolérance et se dit prêt "à examiner avec les parties les modalités appropriées pour reconstituer les conditions de concurrence effective".
A suivre...

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