A Montréal, une église a été reconvertie en musée d'art moderne. L'intervention architecturale, profonde, a été réalisée par Provencher Roy + Associés et a reçu de nombreuses récompenses. L'église a été transformée en salle de concert tandis que l'annexe arrière a été intégralement reconstruite dans un style contemporain.

La reconversion des lieux de culte est toujours délicate. A Montréal, une opération semble avoir récolté l'approbation de tous : la transformation de l'église Erskine & American en centre culturel par les architectes du cabinet Provencher Roy + Associés. "La complexité du projet était de réaliser un bâtiment capable de mettre en scène les collections d'art québécois et canadien, tout en établissant un triple dialogue, avec l'église, les autres pavillons du musée et la ville", détaille Claude Provencher, l'un des concepteurs.

 

D'un côté, l'église Erskine & American, un temple presbytérien au style néo-roman massif, qui possédait une valeur patrimoniale importante pour son architecture, son histoire et sa contribution au paysage urbain de Montréal ; un édifice datant de la fin du 19e siècle, fait de pierres calcaires et d'insertions de grès qui présente une façade texturée et un dôme byzantin, habillée de 140 vitraux dont 20 Tiffany. De l'autre, le musée des beaux-arts de Montréal, en quête d'espace et situé à proximité. Il se porte acquéreur de l'église, fermée depuis le mois de juin 2004, et entreprend entre 2009 et 2011, la rénovation du temple et la construction d'un nouveau pavillon de 5 étages situé sur l'arrière.

 

Marbre blanc
Cette nouvelle annexe s'intègre dans le reste du complexe muséal par une réinterprétation du marbre blanc utilisé pour les façades des pavillons Michal & Renata Hornstein de 1912 et Jean-Noël Desmarais de 1991. Les architectes ont donc enveloppé le nouvel édifice d'un mur de marbre qui provient de la même carrière du Vermont (Etats-Unis) que ses deux prédécesseurs. "On voulait donner le sentiment que les espaces d'exposition avaient été sculptés dans un gigantesque bloc de marbre", explique Matthieu Geoffrion, chargé du projet du pavillon Bourgie.

 

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Elévation spirituelle

Bourgie
Bourgie © v2com
D'une grande sobriété, le pavillon d'art établit un dialogue naturel avec la ville : des ouvertures vitrées permettent de la voir depuis tous les niveaux et la verrière du sommet offre un lien visuel fort avec le Mont Royal. Un autre dialogue s'instaure avec l'église, puisque le bâtiment en évoque l'esprit, par son élévation, prolongée d'une ouverture vers le ciel, et par la présence d'alcôves dessinées autour des espaces d'exposition. Depuis le sous-sol (relié au réseau souterrain du Musée des beaux-arts) jusqu'au quatrième étage, les architectes ont opté pour un "crescendo d'expériences". Les cinq niveaux proposent une scénographique chronologique, allant de l'art inuit, au salons du 19e siècle en passant par l'époque coloniale. Au fur et à mesure de l'élévation physique, l'intensité de la lumière naturelle se fait plus présente, depuis le clair-obscur jusqu'à l'illumination, en cheminant par le grand escalier central. La verrière du dernier niveau renferme une valeur figurative : sa forme, qui évoque une construction de glace comme un igloo, établit un lien symbolique avec les œuvres inuit qui sont exposées en-dessous.

 

La reconversion a été unanimement saluée : elle a notamment récolté le 2010 Canadian Architect Awards of Merit, le Grand Prix du design 2011, le Prix d'excellence 2011 de l'Institut de développement urbain du Québec et le Prix d'intégration architecturale de l'Opération patrimoine architectural de Montréal. Aujourd'hui, le musée "réinventé" a connu une forte hausse de sa fréquentation (+36 % en 2011) qui le propulse en tête des musées québécois et à la 2e place des musées canadiens après le Royal Ontario Museum de Toronto.

 

Fiche technique du pavillon d'art québécois et canadien "Claire & Marc Bourgie" :
Client : Musée des beaux-arts de Montréal
Architectes : Provencher Roy + Associés (Claude Provencher, Matthieu Geoffrion, Eugenio Carelli, Jean-Luc Rémy, Denis Gamache)
Intervenants : Gesvel (direction du projet), Pomerleau (entrepreneur général), DFS Architecture + Design (restauration de l'enveloppe de l'église), Nicolet Chartrand Knoll Itée (structure), Enerpro et Le groupe Conseil Berman (électromécanique), GO Multimédia (intégration technologique et scénographique), Legault & Davidson (acoustique), Ville de Montréal (jardin)
Superficie : 5.483 m²
Date de finalisation : 2011

Esquisse

Bourgie
Bourgie © v2com
Une vue du projet permet de visualiser la transformation de l'église historique en auditorium de 444 places et l'adjonction du pavillon de marbre blanc sur l'arrière de l'édifice.

Chantier

Bourgie
Bourgie © Wikimedia
Les travaux de rénovation de l'église Erskine & American ont respecté les recommandations de la commission des lieux et monuments historiques du Canada lors d'une opération minutieuse sur l'enveloppe. Certaines parties endommagées ont été resculptées. Les 146 vitraux (dont 20 Tiffany) ont été démontés, restaurés et replacés derrière des panneaux de verre assurant l'étanchéité de l'édifice.

Salle de concert

Bourgie
Bourgie © v2com
L'intérieur de l'église a intégralement été repensé. Les plafonds de plâtre et les moulures ont été entièrement restaurés ainsi que les ouvrages de menuiseries agrémentant la nef. La salle Bourgie (du nom de deux mécènes importants, anciens propriétaires de salons funéraires...) apporte un volet musical au musée des beaux-arts de Montréal.

Pavillon

Bourgie
Bourgie © v2com
Le pavillon de marbre blanc avec ses ouvertures de plus en plus nombreuses au fur et à mesure de l'ascension dans les niveaux.

Escalier

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Bourgie © v2com
L'escalier central qui relie les cinq niveaux (y compris le sous-sol). Il participe à la distribution de la lumière naturelle.

Verrière

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Bourgie © v2com
La verrière du dernier étage qui constitue un dôme de glace répondant à la fois à l'élévation spirituelle et physique de l'église et à la collection d'objets inuit qu'abrite la salle du 4e niveau.

Collections

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Bourgie © v2com
Les collections se répartissent sur quatre niveaux chronologiques, les plus récents étant situés dans les étages inférieurs.

Musée des beaux-arts de Montréal

Bourgie
Bourgie © v2com
Le bâtiment Bourgie fait face au Musée des Beaux-arts auquel il est relié par un passage souterrain. Il semble lui répondre architecturalement grâce au jeu des matériaux et des volumes.