TEMOIGNAGE. Depuis l'annonce d'un recentrage du CITE pour les fenêtres, Thomas Medina, patron d'une entreprise de menuiserie aluminium, vit des jours compliqués. Il relate à Batiactu les difficultés qu'il rencontre.

Thomas Medina, est responsable d'une menuiserie aluminium dans les Sud-Ouest. Si jusqu'à présent tout marchait bien, il craint de revivre ce qu'il a vécu lorsqu'il travaillait dans le photovoltaïque. La raison ? L'annonce fin septembre par le Gouvernement de la sortie des fenêtres du Crédit Impôt pour la Transition Énergétique (CITE) qui perturbe son activité. "Ce qui me met le bourdon, pour avoir vécu ça dans le photovoltaïque avec le moratoire qui avait tué une filière complète, c'est que nous sommes en train de faire la même avec les fenêtres. C'est-à-dire qu'on prend une décision du jour au lendemain avec une application le jour même," nous confie le responsable de l'entreprise de menuiserie aluminium Lapegue.

 

 

Si le chef d'entreprise n'est pas opposé à la révision du CITE, en revanche, il regrette que cette décision mette à mal sa relation avec ses clients. "Nous avons un message très difficile auprès de nos clients lorsque nous revenons vers eux pour leur dire que finalement l'incitation fiscale à laquelle ils avaient droit n'est plus la même. On s'expose à casser nos ventes", nous explique-t-il.

 

"Le problème de ce changement de règle, c'est que nous ne savons pas gérer cela avec nos clients", poursuit l'aluminier. "Nous devons avoir un message clair et pas leur dire qu'on ne sait pas s'ils pourront ou non bénéficier de crédit d'impôt, ni le montant de la réduction", ajoute-t-il. Ces changements lui prennent donc "une énergie et un temps fous", raconte Thomas Medina. "A chaque fois que mes clients entendent une information sur les fenêtres, ils nous téléphonent pour en savoir plus et nous ne savons pas forcément leur répondre", explique-t-il, regrettant que "cela ne fasse pas sérieux". Face à ces incertitudes, deux de ses clients ont préféré reporté leur projet, nous confie-t-il. Un comble pour lui alors que "ces incitations ne lui rapportent rien", tient-il à faire remarquer.

 

Renouvellement du label RGE et Qualibat ?

 

Thomas Medina déplore la façon de faire même s'il "peut comprendre la baisse du CITE parce que l'Etat cherche à faire des économies". Par contre, il n'accepte pas la brutalité et le manque de concertation avec les professionnels alors qu'il y a pourtant "des fédérations (SNFA, FFB, Capeb) qui sont là pour ça".

 

Une autre question s'est aussi posée à lui depuis cette annonce, celle de la nécessité de renouveler ou non son label RGE et Qualibat, qui représente tout de même un investissement de 3.000 euros environ par an. "Est-ce que ça sert à quelque chose s'il n'y a plus de CITE ?", s'est-il interrogé avant de finalement décidé de les renouveler "dans un esprit de certification".

 

Laisser du temps pour la mise en place des nouvelles conditions

 

Et même si Emmanuel Macron a annoncé le 6 octobre que le recentrage du CITE allait bénéficier d'un "accompagnement en sifflet" pour les menuiseries, le responsable de l'entreprise Lapegue n'est pas pour autant rassuré. Il craint que cela ne génère des complexités administratives et que son entreprise ne se fasse épingler par l'administration fiscale pour avoir mal respecté les règles et les changements de fiscalité. Pour l'heure, Thomas Medina souhaite que le Gouvernement prenne des décisions claires et définitives mais surtout qu'il laisse aux entreprises du temps pour leur mise en place.

 

 

"Il faut aussi considérer le RGE comme une démarche qualité", Alain Maugard (Qualibat)

 

Alain Maugard, président de Qualibat, est conscient du problème que peut poser pour un professionnel la réforme du CITE. "Si un professionnel est venu au RGE uniquement pour faire bénéficier ses clients du crédit d'impôt, c'est normal qu'il se pose aujourd'hui des questions", observe-t-il auprès de Batiactu. "Mais je rappelle que le RGE est également nécessaire pour profiter des certificats d'économies d'énergie." Par ailleurs, le label Reconnu garant de l'environnement irait, selon lui, au-delà d'un problème d'éco-conditionnalité des aides. "Le RGE peut être appréhendé comme une démarche qualité : il y a un audit, où des experts en bâtiment viennent échanger avec les professionnels, leur donner des conseils sur les points de vigileance afin qu'ils montent en compétences", explique-t-il. "Notre monde est en mutation. Les logements construits demain seront de plus en plus performants, et cela nécessitera des entreprises de plus en plus compétentes. C'est un phénomène irréversible. Ainsi, dans le futur, ceux qui ne seront pas au niveau auront du mal à se placer sur le marché."

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