RÉACTIONS. Le rapport "Vivre ensemble - Vivre en grand la République" remis par Jean-Louis Borloo au Premier ministre a suscité de nombreuses réactions de la part des acteurs du logement, de la construction, des syndicats et du monde politique. Retrouvez les plus marquantes.

Globalement, le mot qui revient le plus pour évoquer le rapport Borloo sur la politique de la ville est "ambitieux". Qu'il s'agisse d'Action Logement, de la Fédération française du bâtiment ou de la CFDT, tous louent le travail qu'a réalisé l'ancien ministre et les propositions qu'il a rassemblées. Le syndicat exprime même sa satisfaction sur le processus d'élaboration de ce rapport, auquel il précise avoir "largement participé ces derniers mois". Et la CFDT, par la voix de Marie-Andrée Seguin, sa secrétaire générale, déclare "apporter son soutien aux programmes formulés dans ce rapport" qu'il s'agisse d'éducation, d'emploi, de santé, de logement, de culture, de mobilité ou de sécurité.

 

 

Les filières du logement et de la construction veulent relancer l'Anru

 

Le groupe paritaire Action Logement exprime partager "le constat sévère formulé par Jean-Louis Borloo" et "salue la nouvelle ambition pour la politique de la ville". Pour le financeur des politiques de renouvellement urbain, "il est impératif que la politique de rénovation urbaine retrouve son ambition originelle". Dans un communiqué cosigné par le président de son conseil d'administration, Bruno Arcadipane, et par le vice-président, Jean-Baptiste Dolci, Action Logement déclare que l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) se trouve à l'arrêt depuis 3 ans. Une panne qui ne serait pas liée à son financement, "mais avant tout à un problème d'organisation et de gouvernance de cet outil". Ils appellent donc à une redéfinition de sa nature, de son rôle et de ses moyens, en la dotant d'une capacité de co-investissement renforcée pour financer davantage de démolitions et soutenir les bailleurs fragilisés. Action Logement appelle de ses vœux "un outil plus réactif et des procédures simplifiées", ainsi qu'une gouvernance assurée par les financeurs en partenariat avec les collectivités locales et les bailleurs sociaux.

 

La Fédération française du bâtiment (FFB), elle, met en exergue une phrase du rapport Borloo : "Les grues doivent revenir dans les quartiers dès la fin de l'année". La fédération note, elle aussi, que le Nouveau programme de rénovation urbaine (NPNRU) tourne au ralenti depuis plusieurs mois et qu'une accélération est donc nécessaire, afin de reprendre un rythme opérationnel plus élevé "comme l'a été le premier programme PNRU porté par l'Anru, depuis 2003". La filière du bâtiment estime que ce programme a constitué un levier économique important, générant entre 45 et 50 milliards d'euros d'investissements sur tout le territoire, dont les premiers bénéficiaires auraient été les habitants des quartiers.

 

Des politiques plus critiques

 

Du côté des politiques, le sentiment est plus mitigé. Stéphane Gatignon, ancien maire écologiste de Sevran, qui a démissionné en mars 2018 de ses fonctions, "usé" par le "mépris de l'Etat pour les banlieues", estime que le document est "un rapport assez complet (…) qui aborde tous les aspects". L'ex-édile souligne que "surtout, il appelle à se mobiliser, ce n'est pas que de l'argent de l'Etat qu'il attend". Celui qui a dirigé la municipalité de Sevran pendant 17 ans assène : "Mixer les populations, ça c'est l'essentiel, péter le ghetto. Ca, ce n'est pas seulement de l'argent". Benoît Hamon, candidat malheureux à la présidentielle de 2017, a lui aussi réagi. Pour lui, le rapport est ambitieux mais "il marque d'une pierre noire le fait que depuis 15, 20, 30 ans, on a laissé dans ce pays les inégalités se creuser, les ghettos se constituer" ce qui amène la situation explosive d'aujourd'hui. Celui qui fut ministre de l'Education nationale pendant quatre mois, en 2014, pointe toutefois des désaccords avec les propositions de Jean-Louis Borloo. Il précise que "la question de la ghettoïsation ne se règlerait pas que par du béton" et déplore que le gouvernement n'aie pas "un euro à mettre sur les quartiers". Malgré tout, il espère que l'exécutif aura "le quart de l'ambition qu'a ce rapport".

 

 

Enfin, le plus pessimiste est Malek Boutih, ancien élu PS, pour qui le rapport, même s'il "porte la marque de l'ingéniosité et de l'esprit de Jean-Louis Borloo", sera toutefois voué "à un échec profond", "comme tout ce qui a été entrepris précédemment". Plutôt que de voir les banlieues "comme une start-up potentielle pour la France", il faudrait, pour celui qui fut le président de SOS Racisme, "normaliser ces quartiers" et garantir un traitement égalitaire et républicain de tous les citoyens. "Oui, il peut y avoir des réalités sociales différentes, mais pas de 'pays' dans le pays", a-t-il déclaré dans un entretien à l'Express.fr.

 

Il est prévu que le rapport "Vivre ensemble - Vivre en grand la République" nourrisse le "plan de mobilisation" en faveur des quartiers prioritaires que le président annoncera dans le courant du mois de mai 2018.

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