ENERGIE. Pour réduire la part du nucléaire dans l'électricité française et la remplacer par des sources renouvelables, le ministre de la Transition écologique annonce étudier la fermeture de nombreux réacteurs.

Après avoir présenté le Plan Climat du quinquennat Macron, Nicolas Hulot fait des annonces plus précises. Notamment sur l'électricité nucléaire, dont la part en France doit passer de 75 % aujourd'hui à 50 % en 2025, selon les engagements confirmés de la loi de Transition énergétique pour la croissance verte de Ségolène Royal. Interrogé sur l'antenne de RTL, le ministre répond : "Chacun peut comprendre que pour tenir cet objectif, on va fermer un certain nombre de réacteurs". Et il enchaîne : "Laissez-moi planifier les choses : ce sera peut-être jusqu'à 17 réacteurs, il faut qu'on regarde. Chaque réacteur a une situation économique, sociale et même de sécurité très différente".

 

 

Des déclarations qui interviennent tandis qu'EDF a obtenu, au mois d'avril 2017, de repousser la fermeture de la plus ancienne centrale française, celle de Fessenheim dans le Haut-Rhin, située sur une faille géologique. Pas question donc de Grand Carénage pour Nicolas Hulot, qui entend diversifier le mix énergétique national et intensifier le déploiement des renouvelables.

 

Dix-sept réacteurs soit cinq centrales

 

Mais quelles seront les conséquences de ce choix ? Tout d'abord, il convient de déterminer quels réacteurs seront fermés. En se basant seulement sur l'âge des installations, en incluant Fessenheim 1 et 2 dans la liste des 17 réacteurs à fermer (sur 62 en exploitation), alors quatre autres centrales seraient impactées : Bugey dans l'Ain, avec ses réacteurs numérotés 2 à 5, Tricastin dans la Drôme, avec les tranches 1 à 4, Dampierre dans le Loiret et ses 4 réacteurs, en enfin Gravelines dans le Nord pour les tranches 1 à 3. Des usines qui sont toutes entrées en service entre 1972 et 1975 et qui sont de type CP0 et CP1. Le réacteur numéro 4 de Gravelines, en revanche, serait "épargné", puisque figurant en 18e position sur la liste. Les plus anciens réacteurs affichent entre 33 et 36 ans de durée d'exploitation, depuis leur premier raccordement au réseau électrique, contre 28,7 années pour l'âge moyen du parc français.

 

Au point de vue de la production de courant, l'impact sera colossal. Les installations concernées appartiennent toutes au palier des 900 MWe. L'arrêt de 17 réacteurs de cette puissance unitaire privera la France de plus de 15,3 GW d'électricité à l'horizon de 2025, une baisse qui sera potentiellement compensée (en partie) par l'entrée en service de Flamanville 3, réacteur de nouvelle génération (EPR) d'une puissance très élevée de 1.600 MW. Les 13,7 GW restant devront donc être compensés par un intense développement de sources alternatives ou par une réduction drastique des consommations. Pour comparaison, le parc éolien terrestre français dépasse seulement les 12,1 GW à ce jour. Son doublement d'ici à 2025 ne suffirait donc pas. L'entrée en service de huit fermes offshore de grandes dimensions (500 MW chacune, soit 4 GW en tout), améliorera toutefois ce bilan, qui pourra également compter sur l'appoint de l'énergie solaire photovoltaïque dont le parc est aujourd'hui d'un peu moins de 7 GW.

 

 

Des milliards d'investissements

 

Les sommes à investir seront colossales. D'autant que le coût de l'arrêt des centrales sera déjà important. Le conseil d'administration d'EDF a notamment prévu de demander une indemnisation du préjudice résultant de la fermeture "anticipée" de la seule centrale de Fessenheim, d'un montant de l'ordre de 500 millions d'euros pour les deux réacteurs. Multipliée par le nombre d'installations évoqué par le ministre de la Transition écologique, la facture pourrait donc dépasser les 4 milliards d'euros. Un coût humain et social devra également être anticipé, puisque l'unité de Fessenheim emploie 800 personnes et 250 prestataires, celle de Dampierre environ 1.200 personnes dont 300 prestataires et celle de Bugey, 1.400 personnes plus 400 prestataires. Le démantèlement des sites et la reconversion durable vers d'autres activités seront donc des questions cruciales puisque plusieurs milliers d'emplois seront concernés par ce choix de société. Nicolas Hulot n'en démord pas : "Si nous voulons atteindre l'objectif, mécaniquement, à mesure que nous allons baisser notre consommation et diversifier notre production, nous allons fermer un certain nombre de réacteurs". Mais peut-être pas dix-sept dans les 8 ans qui viennent.

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