ANNONCE. Eradication des passoires thermiques, convergence des fiscalités sur les carburants, montée en puissance de la taxation carbone... Le ministre de la Transition écologique a dévoilé, ce jeudi 6 juillet 2017, un ensemble de mesures destinées à décarboner l'Hexagone afin de rendre son empreinte neutre à l'horizon de 2050. Tour d'horizon et premières réactions.

Le nouveau ministre de la Transition écologique a présenté un "Plan Climat" qui définit la stratégie française pour les années qui viennent, afin de parvenir à limiter les émissions de gaz à effet de serre du pays et mettre en œuvre l'Accord de Paris. Un plan qui reposera sur l'action conjointe de différents ministères.

 

 

Ce mardi 4 juillet, le Premier ministre avait déjà levé un coin du voile sur différentes mesures, notamment l'arrêt de toute délivrance de permis d'exploitation d'hydrocarbures (pétrole, gaz, charbon et gaz de schiste) sur le territoire et l'alignement, d'ici à 2022, de la fiscalité du Diesel sur celle de l'essence. La ministre des Transports, Elisabeth Borne, a, devant la FNTP, annoncé l'intention du gouvernement de taxer les poids-lourds empruntant les axes routiers français. Elle a déclaré : "Il faut bien que quelqu'un paie" ces infrastructures de transport. Evoquant la question du budget, la ministre répond : "Entre les besoins pour maintenir nos réseaux en état, les moderniser et les engagements qui ont été annoncés, il manque 10 milliards sur le quinquennat (…) A un moment donné, il n'y a pas de mystère : c'est l'utilisateur ou le contribuable qui paie". Le gouvernement aurait opté pour la première solution, sans pour autant relancer l'écotaxe, initiée lors de la présidence de Nicolas Sarkozy et abandonnée sous celle de François Hollande. Elisabeth Borne souhaiterait tenir compte des spécificités des territoires régionaux (à l'image de la Bretagne, excentrée), afin de ne pas pénaliser toutes les entreprises de transport.

 

Éradiquer les passoires thermiques en 10 ans

 

Nicolas Hulot a, quant à lui, confirmé le souhait, exprimé par Edouard Philippe, de renforcer la taxe carbone dans la décennie à venir au profit de l'économie verte. Le ministre de la Transition a assuré que des "mesures d'accompagnement" seraient prises pour aider les personnes en situation précaire, y compris sous forme de chèques énergie. Précisément, à propos de ces ménages fragilisés, le ministre de la Transition écologique a déclaré : "Dans un délai de 10 ans, on va faire disparaître tout ce qu'on appelle les passoires thermiques", qui seraient au nombre de 8 millions. Pour Nicolas Hulot, "le sujet de l'efficacité énergétique est un sujet où tout le monde gagne" et dont "la rentabilité n'est pas compliquée à démontrer". Il a rajouté : "Je considère que ce ne sont pas des dépenses mais des investissements" en évoquant l'utilisation de 4 milliards d'euros du plan d'investissement annoncé par Edouard Philippe. L'objectif du gouvernement est clair : "Eradiquer complètement la précarité énergétique". Pour y parvenir, il proposera un diagnostic "à tous les Français modestes (…) aux locataires et propriétaires en situation de précarité énergétique, qui ont du mal à se chauffer".

 

Autre annonce, le ministre de la Transition écologique a confirmé le souhait de renforcer le soutien aux productions d'énergies décentralisées. Nicolas Hulot entend aller "beaucoup plus vite et beaucoup plus loin" dans les aides à la production locale d'électricité : "On aidera également les quartiers et les zones rurales à produire et à consommer leur propre énergie, biogaz ou énergie solaire", a-t-il précisé. Concernant l'économie circulaire, il est prévu que les déchets mis en décharge soient divisés par deux d'ici à 2025. In fine, l'ambition française sera d'arriver à la neutralité carbone dès 2050, c'est-à-dire que toutes les émissions de gaz à effet de serre nationales soient exactement compensées par ce que peut capturer le territoire français (forêts, zone océanique…).

 

Des réactions mitigées voire sévères

 

 

Les premières réactions, contrastées, à ces annonces, n'ont pas tardé. Dès mercredi, plusieurs fédérations patronales de transporteurs routiers avaient fait savoir que l'écotaxe "sous quelque forme que ce soit", constituait "une ligne rouge pour la profession" à ne pas franchir. Le Réseau Action Climat (RAC) qui avait formulé de hautes attentes suite aux déclarations d'Emmanuel Macron lorsqu'il avait tancé Donal Trump sur la sortie de l'Accord de Paris, se montre déçu. Dans un communiqué, le RAC précise : "Il y a trois grands absents dans ce Plan Climat. Celui-ci passe totalement sous silence la nécessaire fermeture des centrales nucléaires, indispensable à l'atteinte des objectifs de la loi de Transition énergétique, et pour laisser la place aux énergies renouvelables". Autre reproche, le recul sur la question d'une taxe sur les transactions financières européennes censée générer des recettes pour favoriser la solidarité climatique internationale. "Ce revirement de positionnement est inacceptable pour le RAC", qui considère cet outil comme capital pour aider les pays les plus pauvres. "Enfin, le Plan Climat ne prévoit pas de revoir radicalement la mauvaise position française sur les puits de carbone", notent les associations. Elles distribuent cependant quelques bons points, sur la volonté gouvernementale de fermer les dernières centrales à charbon d'ici à la fin du mandat notamment.

 

Quant à la CLCV, association nationale de défense des consommateurs et d'usagers, elle tempête : "Ce jour, le ministre vient de proposer un Plan Climat dont la tonalité est bienvenue et positive. Cependant, nous ne partageons pas l'idée selon laquelle la fiscalité du carburant est un bon outil de changement des comportements". L'association estime que la taxation ne fera pas baisser les consommations et qu'elle ne fera qu'alourdir l'imposition : "Dans un passé récent (la contribution climat énergie dans la précédente mandature), la forte augmentation de la fiscalité du carburant a servi à financer la baisse des charges des entreprises (le CICE). Les annonces du gouvernement penchent pour une continuité (…) et les fonds ne serviront pas à financer la transition énergétique et notamment à aider les particuliers dans des achats verts". La CLCV se montre ferme : elle s'opposera à une augmentation trop franche de cette fiscalité sur l'énergie.

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