Une étude lancée par l'Ademe, l'ATEE et la DGCIS a évalué le potentiel du stockage d'énergie français à l'horizon de 2030. En plus de soutenir le développement des renouvelables, ces solutions pourraient générer plus de 10.000 emplois sur le territoire.

Alors que la Commission européenne vient d'avaliser l'octroi de subventions publiques pour la construction de centrales thermiques afin de pallier l'intermittence des énergies renouvelables, une étude montre l'intérêt des méthodes de stockage d'électricité, de chaleur et de froid. Ces dernières pourraient faciliter la transition énergétique et représenter un atout économique en engendrant une véritable filière industrielle nationale.

 

Selon une étude publiée conjointement par l'Ademe (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie), l'ATEE (Association technique énergie environnement) et la DGCIS (Direction générale de la compétitivité de l'industrie et des services), le développement du stockage d'énergies pourrait permettre la création de 10.000 emplois en France. La filière, déjà identifiée comme étant une piste de reconquête industrielle parmi les 34 plans présentés par Arnaud Montebourg et François Hollande, est également la première priorité des "Sept ambitions pour la France" de la Commission innovation présidée par Anne Lauvergeon. Pour les cabinets McKinsey et Boston Consulting Group le marché mondial des solutions de stockage est estimé entre 75 et 450 Mrds €/an, dont 15 Mrds pour le stockage stationnaire. Rappelons que cette solution consiste à disposer de sites dédiés qui viennent en appui au réseau électrique et aux sites de productions EnR.

 

Un fort potentiel
D'après le document de l'Ademe et de ses partenaires, la solution la plus rentable pour les besoins français serait les stations de transfert d'énergie par pompage (Step), dont une capacité de 5 GW existe déjà. Un potentiel supplémentaire de 1 à 1,5 GW pourrait être envisagé à court terme. "Cette solution de stockage d'électricité de masse pourrait voir ensuite son potentiel et sa rentabilité s'accroître notablement à partir de 2030, quand les puissances installées de photovoltaïque et éolienne se seront accrues", précisent les auteurs. D'autres systèmes plus réactifs mais d'une puissance moindre (volants d'inertie, batteries) pourraient fournir des réserves primaires, mobilisables en cas de déséquilibre du système électrique. "Le stockage d'énergie thermique, particulièrement sur les réseaux de chaleur ou couplé avec des cogénérations, apparaît également intéressant", estiment-ils. Il représenterait un potentiel de 5 à 10 GWh et apporterait une flexibilité complémentaire sur l'équilibre offre-demande de chaleur, permettant, de ce fait, de réduire les coûts d'investissements dans les chaufferies.

 

Lancer des expérimentations en Outre-mer
La situation des zones non interconnectées (ZNI) au réseau comme les îles a été étudiée. Fortement pourvus en énergies renouvelables intermittentes, qui représentent 30 % de la production d'électricité, ces territoires bénéficient grandement du stockage électrique. C'est pourquoi le rapport suggère de favoriser les projets de R&D et les démonstrateurs afin d'abaisser les coûts des solutions proposées, les DOM-COM apparaissant comme des territoires d'expérimentations privilégiés. "En effet, un premier gisement de 200 à 400 MW est atteignable à court terme. (…) Ce tremplin permettra de renforcer les compétences des industriels tricolores et la constitution d'une filière exportatrice de savoir-faire, de technologies et de systèmes complets", met en avant l'étude.

 

De son côté, le rapport sur les "Sept ambitions pour la France" propose d'activer différents leviers d'actions. Outre l'ouverture d'un concours d'innovation en lien avec les ZNI, il insiste sur la clarification nécessaire des conditions tarifaires d'accès aux réseaux des installations de stockage. Le document pose les questions suivantes : "Une installation de stockage est-elle un moyen de production, ou un équipement du réseau comme un transformateur ? Est-elle un complément installé par le consommateur comme un générateur ?", souhaitant une harmonisation européenne des réglementations et des statuts. Deux voies apparaissent alors : imposer une obligation de stockage aux producteurs d'énergies intermittentes ou développer un modèle économique propre, donnant aux dispositifs une rentabilité spécifique "avec des acteurs industriels sans doute nouveaux". Enfin, le développement de la commande publique et l'adaptation du cadre réglementaire (notamment pour faciliter leur intégration dans les bâtiments) font partie des autres priorités définies pour que les moyens de stockage puissent se déployer en France et à l'export.

 

Méthodologie de l'étude :
L'étude "Potentiel du stockage d'énergies", a été réalisée par Artelys (optimisation des systèmes énergétiques), Enéa Consulting (conseil en énergie et développement durable) et le G2Elab (laboratoire de recherche en génie électrique de Grenoble). Deux contributeurs techniques y ont collaboré, ErDF et RTE, et dix industriels y ont participé : Alstom, Areva, Dalkia, EDF, EOn France, GDF-Suez, GrDF, Orange, Saft et Total.
Trois scénarios ont été étudiés en parallèle : le RTE Médian (parc installé de 164 GW et production nationale d'électricité de 600 TWh), le RTE Nouveau mix (178 GW, 560 TWh) et le scénario Ademe (157 GW, 440 TWh).

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