Des chercheurs ont calculé les effets de l'élévation du niveau des océans sur le patrimoine culturel mondial : environ 20 % des sites classés par l'Unesco pourraient être submergés par les flots d'ici à 2.000 ans si la température globale venait à gagner 3 °C. Explications.

Un scénario digne du film d'anticipation "Waterworld" se précise : des chercheurs austro-allemands ont cherché à évaluer l'impact du bouleversement climatique et de la montée du niveau des océans sur le patrimoine mondial de l'Unesco. En croisant les projections du Groupe d'experts Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat (GIEC) et la position géographique des différents sites classés, Ben Marzeion (Institut de météorologie et de géophysique d'Innsbruck) et Anders Levermann (Institut de recherche sur l'impact climatique de Potsdam) ont découvert que nombre de monuments historiques, certains millénaires, seraient menacés à long terme.

 

20 siècles sous les mers
Car l'élévation du niveau des mers s'accélère depuis la révolution industrielle. En 2007, un rapport prévoyait que les océans monteraient de 18 à 59 cm en moyenne, d'ici à la fin du siècle. Des estimations qui ne tenaient pas compte de l'apport des glaces du Groenland et de l'Antarctique dont on sait aujourd'hui que l'impact est non négligeable. En les intégrant, les modélisations donnent des niveaux encore plus hauts, allant de 26 à 82 cm, voire presque 1 mètre dans le cas du scénario le plus catastrophique, soit un rythme d'élévation compris entre 0,8 et 1,6 cm par an. En prolongeant le phénomène de réchauffement global sur des siècles, le temps que les glaciers et calottes fondent et que les océans réagissent en profondeur, le niveau des mers pourrait s'élever de 2,3 mètres (+1 °C) jusqu'à 15 mètres (+4 °C)… Déjà, entre 1901 et 2010, les océans ont gagné 19 cm en moyenne, cette hausse n'étant pas uniforme sur le globe.

 

Carte mondiale du patrimoine menacé
Carte mondiale du patrimoine menacé © Environmental Research Letters
Outre les îles et atolls les plus exposés, les régions côtières seront évidemment les plus menacées. Or, ce sont précisément dans ces zones que se concentre la population mondiale : 7 % de l'humanité habiterait aujourd'hui dans un environnement qui aura disparu dans 2.000 ans. Les deltas des grands fleuves seront les premiers impactés : Mississippi, Amazone, Niger, Gange, Mékong ou Yangzi. Une dizaine de pays pourraient perdre plus de la moitié de leur surface actuelle, entraînant des phénomènes de déplacement des réfugiés climatiques, de surpopulation, de famines et d'épidémies. En Europe, si l'on pense immédiatement aux cités lacustres comme Venise et sa lagune, Amsterdam, Bruges et Saint-Pétersbourg, l'article publié dans la revue Environmental Research Letters dresse une liste impressionnante de monuments, villages ou villes emblématiques qui seraient menacés : Naples et Pompéi, l'abbaye de Westminster et la tour de Londres… En France, le Mont-Saint-Michel, un temps menacé de finir ensablé pourrait donc finalement être noyé, tout comme Arles et ses vestiges gallo-romains, Bordeaux et Saint-Emilion, ou encore la cité Auguste Perret du Havre. Il reste 20 siècles pour trouver des solutions et sauver ce qui peut l'être.

 

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