A la fin du mois de juin, des mesures d'air ont révélé une présence trop élevée de fibres d'amiante dans l'air de huit étages de la tour Montparnasse, actuellement en cours de désamiantage. Deux sociétés ont choisi d'évacuer temporairement leurs employés tandis que la préfecture de Paris a engagé les copropriétaires de l'édifice à "prendre les mesures de prévention adaptées afin de supprimer le risque d'exposition passive".

Si le chantier de désamiantage touche à sa fin, la tour Montparnasse ne semble pas pour autant en avoir fini avec ces fibres délétères. Les 26 et 27 juin derniers, des mesures d'air réalisées quotidiennement ont révélé une présence de fibres d'amiante bien au-dessus de la norme appliquée (5 fibres/litre d'air) dans huit étages de l'édifice. Une alerte qui a entraîné l'interruption des travaux et l'évacuation préventive des salariés de deux sociétés installées dans la tour, CNP Assurances et Amundi.

 

Les mesures seraient redevenues normales le 28 juin et certains employés ont réintégré les locaux. Mais la préfecture de Paris a immédiatement demandé une expertise sur les causes de cette pollution, avant d'envisager une reprise du chantier. Durant la période d'attente, le confinement de la zone est maintenu (il concerne un escalier de secours entre les 32e et 45e étages) et des contrôles sont effectués quotidiennement.

 

Une longue série d'incidents
Mais, cet incident ne serait pas isolé, ni dans l'espace, ni dans le temps. La présence d'amiante dans des locaux techniques des 15e, 42e, 57e et 58e étages avait été relevée en mars 2005. Et, dans son arrêté du 13 août, la préfecture évoque "un nombre significatif d'expositions aux poussières d'amiante" et "au moins 72 dépassements du seuil réglementaire" depuis le mois de novembre 2009. Ces dépassements auraient été constatés "y compris dans des zones publiques du centre commercial", selon les pouvoirs publics, qui indiquent : "le risque d'exposition passive des salariés et des personnes de passage sur le site demeure". L'arrêté préfectoral évoque "un système d'aération commun à l'ensemble des bâtiments comme source probable de pollution". Rappelons que la tour de 210 mètres de haut et 58 étages, comporte également 6 niveaux souterrains et se trouve reliée au centre commercial situé à ses pieds, et à deux autres tours plus petites : le bâtiment C, de 12 étages, et la tour Express (bâtiment D, ne contenant pas d'amiante). En tout, l'Ensemble immobilier tour Maine-Montparnasse (EITMM) représente 300.000 m² de surface répartis entre 300 copropriétaires. Chaque jour, 5.000 personnes travaillent dans la tour.

 

Arrêté d'évacuation globale ?
L'administration demande donc que les copropriétaires prennent "les mesures de prévention adaptées afin de supprimer le risque d'exposition passive aux poussières d'amiante" et de procéder à des analyses de l'air. Elle souhaite en outre obtenir une expertise des causes de la pollution dans les quatre mois. En cas de nouveau dépassement, "les locaux du bâtiment concerné devront être évacués de leurs occupants", prévient la préfecture. Les travaux de désamiantage, engagés en 2005, ont coûté pour l'heure environ 250 M€, intégralement pris en charge par les copropriétaires. Selon la copropriété, 4.000 analyses seraient effectuées chaque année, soit une dizaine par jour, afin de garantir la sécurité des intervenants et des employés du site. Par voie de communiqué, les copropriétaires se veulent rassurants : "Dans l'état actuel des choses, il n'est absolument pas envisagé que les bâtiments de l'EITMM puissent faire l'objet d'une évacuation globale puisque, objectivement, rien ne le nécessite".

 

De son côté, l'Andeva (Association nationale des victimes de l'amiante) estime que les torts sont partagés entre l'administration et les nombreux copropriétaires. Jean-Michel Parigot, le vice-président de l'association, déclare : "Les copropriétaires, pour des raisons de petits calculs à court terme, ont choisi de faire traîner au maximum le début des travaux. La multitude de copropriétaires, plusieurs centaines, fait que les décisions ne sont pas simples et on a essayé de tirer au maximum sur la corde pour ne pas faire ce qu'il y avait à faire. (...) d'autre part, l'administration n'a pas fait le contrôle qu'elle aurait dû faire sur cet immeuble". Il ajoute : "Pour ce qui est de la réglementation concernant le volet santé publique, il n'y a jamais eu véritablement de sanctions de prises. Donc là, le fait qu'il y ait une menace de fermeture de locaux est extrêmement important. C'est nouveau, mais cela arrive un peu tard".

 


Dernière minute
Amundi, une des deux entreprises évacuées en juin dernier, qui comptait encore quelque 300 salariés dans la tour à ce moment, a annoncé, ce mardi 27 août 2013, qu'elle ne les réintégrerait pas. La raison ? Un nouveau dépassement enregistré depuis le 13 août qui aurait motivé la décision de la direction, indique l'AFP. Celle-ci a décidé de maintenir le principe de précaution et de garder ses salariés sur le site de repli basé dans les Yvelines, et cherche dès à présent des solutions pour améliorer leurs conditions de travail. D'après certains salariés interrogés par l'AFP, des employés pourraient être répartis dans les locaux d'Amundi sur Paris. L'autre entreprise évacuée, CNP Assurances, aurait repris normalement le travail.

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