Afin de démontrer le bon comportement au feu des solutions isolantes par l'extérieur à base de polystyrène expansé sous enduit, trois syndicats ont uni leurs forces pour mener une campagne d'essais. Se basant sur les résultats collectés, ils publient aujourd'hui un guide de préconisations à l'usage des professionnels, pour que les bonnes pratiques se généralisent.

"C'est une démarche inédite, un projet démarré voilà trois ans qui rassemble tous les industriels du secteur de l'isolation thermique par l'extérieur, avec trois syndicats différents : l'Afipeb, le Sipev* et le SNMI**", déclare en introduction Paul Jallon, le président de l'Association française de l'isolation en polystyrène expansé dans le bâtiment (Afipeb). "Accompagnés par les ministères de l'Intérieur et du Logement, notamment par la DHUP, nous avons élaboré en commun un guide de préconisations qui sera prochainement publié sur leurs sites", poursuit-il. Un document mis en ligne afin de mettre en lumière les bonnes pratiques à suivre lors de la mise en œuvre d'une isolation thermique par l'extérieur, réalisée au moyen de polystyrène expansé (PSE) sous enduit.

 

Car la réglementation française est ancienne : si l'Instruction technique n° 249 qui régit la sécurité incendie des façades pour les établissements recevant du public (ERP) a été remise à jour en 2010, le texte évoquant les logements est beaucoup plus ancien et date de 1986. Les ministères ont donc décidé, au mois de septembre 2015, de recommander d'appliquer l'IT 249, dans sa dernière version, aux bâtiments d'habitation. "Les industriels du PSE sont engagés depuis des années dans le développement de solutions efficaces qui répondent à la réglementation", assure Paul Jallon, qui insiste sur l'amélioration des produits et des procédés.

 

Des essais de tenue au feu grandeur nature

 

"Cette évolution des produits et systèmes nécessitait la mise en place d'essais afin de vérifier le bon comportement au feu et la non propagation des flammes en façade", renchérit Matthieu Couturier, du Sipev*. Une campagne d'essais a été menée selon le protocole d'essais Lepir 2 (Local expérimental pour incendie réel à deux niveaux), "conformément aux dispositions de l'IT 249 actuelle", insistent les trois syndicats. Menés par les laboratoires Efectis et Crepim, ces tests grandeur nature, d'un coût conséquent (environ 30.000 euros par essai pour un budget total de 300 k€ pour toute la campagne), impliquent en effet la construction d'une véritable façade R+2, laquelle est soumise à un feu alimenté par 600 kg de bois. Un test représentatif d'un incendie domestique où le mobilier apporte beaucoup de combustible et risque de se propager verticalement et horizontalement par les fenêtres.

 

Une première phase d'analyse avait été menée préalablement par le CSTB, qui a épluché 300 rapports d'essais dans le but d'identifier les paramètres les plus influents sur les résultats. Huit essais d'orientation selon le protocole Lepir 2 ont ensuite été menés avant de sélectionner les trois configurations les plus représentatives de l'ITE polystyrène sous enduit en France : techniquement elles couvrent trois familles de systèmes (enduit hydraulique, organique ignifugé ou mixte). "Les essais ont été réussis, même après plus de 30 minutes d'exposition au feu : il n'y a eu aucun impact significatif sur la propagation de l'incendie vers les niveaux supérieurs", rapporte Régis Koryluk, du laboratoire Efectis. "La flamme ne s'est pas propagée verticalement ou latéralement, et la peau externe n'a pas été percée, ce qui revalide l'ensemble du plan d'expérience", poursuit-il.

 

Jeter de l'huile sur le feu avec la laine de roche ?

 

Des conclusions qui ont servi de base à la rédaction du guide qui servira aux professionnels, afin de bien réaliser l'isolation thermique par l'extérieur. Validé par toutes les parties, il décrit tous les dispositifs constructifs (épaisseur de l'isolant, système d'enduit, ajout de bandeau filant en laine de roche…). "Il s'agissait surtout de rappeler les différences existantes entre enduits épais et enduits minces, de repréciser les choses et de bien asseoir les règles", ajoute Matthieu Couturier. Le document fera foi, puisque avalisé par le ministère de l'Intérieur.

 

"Il n'y a pas d'opposition entre le PSE et la laine de roche", déclare Laurent Galloux, du SNMI**. "Le choix se fait selon les contraintes techniques et économiques du maître d'ouvrage". Cependant, les industriels du PSE estiment que certains essais menés par des promoteurs de solutions alternatives les désavantageaient trop et ne répondaient pas aux critères officiels (Lepir 2). La campagne d'essais et de communication lancée par les tenants d'une isolation au polystyrène expansé viserait donc à rétablir la solution dans son honneur. "Nous allons faire la communication de ces préconisations et nous rapprocher des assureurs et bureaux de contrôle, avant de nous tourner vers les maîtres d'ouvrage et les entreprises, afin que le guide soit bien pris en compte", conclut-il.

 

 

Le marché de l'ITE en France en quelques chiffres :
20 millions de m² (sous enduit et sous bardage, les deux grandes familles de solutions)
dont 11 millions de m² pour les isolants sous enduits (mince ou épais)
90 % de systèmes PSE
140 mm d'épaisseur standard d'isolant (contre seulement 60-80 mm en 2007-2008)

 

* "Syndicat national des industries de peintures, enduits et vernis"
**"Syndicat national des mortiers industriels"

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