Batiactu : Les collectivités sont-elles inquiètes du projet de nouvelle banque de la Caisse des dépôts et consignations et la Banque Postale ?
Jacques Pélissard :
Les collectivités s'inquiètent particulièrement des suites du projet de nouvelle banque Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) - Banque Postale. Initialement annoncé pour la fin du premier trimestre 2012, on évoque aujourd'hui la fin du 1er semestre. Tout décalage dans sa mise en œuvre ne fera qu'accentuer les difficultés des collectivités locales pour le financement de leurs projets. Si un accord a enfin été trouvé, on peut craindre que la mise œuvre de cette nouvelle banque prenne du temps. Par ailleurs, même si elle venait à être opérationnelle à l'été, on peut s'inquiéter de sa capacité à lever des volumes de prêts importants. En tout cas, il est hautement improbable qu'une structure nouvelle puisse lever les 4 Md€ manquants (déduction faite des 5 Md€ via les fonds d'épargne) en 2012.
L'agence de financement des collectivités locales, qui doit impérativement trouver sa place dans le calendrier législatif, doit pouvoir parachever l'offre de financement aux collectivités locales au début de l'année 2013.

 

Batiactu : D'après les experts de Bercy, si les collectivités locales avaient stabilisé leurs effectifs entre 2010 et 2011, elles auraient pu économiser 7,3 Md€ sur la même période…
Jacques Pélissard :
Le chiffre avancé ne peut être rapproché d'aucune réalité : une dépense de 7,3Md€ correspondrait à environ 1 million d'agents. Or, entre 2009 et 2010, les premiers chiffres donnent une progression de 50.000 emplois environ.

 

Par ailleurs entre 2005 et 2010, hors déduction de la participation de l'Etat à la décentralisation des personnels, les collectivités ont une augmentation moyenne de 2,6 Md€/an de leur dépense de personnel. Et entre 2008 et 2010 cette moyenne est même de 1,8Md€. Ces moyennes comprennent en plus le coût des mesures nationales que les collectivités ne décident pas (point indice, SMIC, % des charges patronales, grilles indiciaires,…). Ainsi ces mesures ont représenté entre 2008 et 2010 près de 500 M€ année pleine.

 

Batiactu : Les collectivités sont-elles responsables de l'endettement qui est de 1.700 Md€ dont 175 proviennent des collectivités ? Le confirmez-vous ? Et peut-on encore parler aujourd'hui d'un « prétendu laxisme » des collectivités locales ?
Jacques Pélissard :
En 2010, les collectivités finançaient 71 % de l'investissement public alors que la dette publique locale nette ne représentait que 7,8 % du PIB français. Comme le rappelle la Cour des comptes dans son rapport public relatif à la gestion de la dette publique locale de juillet 2011, l'endettement public local représente donc une faible part de la dette publique de la France, et, sur une longue période, son poids dans le PIB n'a pas progressé malgré les transferts de compétence de l'Etat vers les collectivités territoriales. La crise de 2008 n'a pas non plus eu pour effet d'alourdir sensiblement l'endettement des administrations publiques locales qui n'a augmenté que de 1,1 point de PIB entre 2007 et 2010, contre 15 points de PIB supplémentaires dans le cas de l'Etat.
Par ailleurs, il faut rappeler que le recours à l'emprunt pour les collectivités locales n'est possible que pour financer les investissements et non la section de fonctionnement du budget. Dans le rapport précité, la Cour des comptes rappelle que contrairement à l'Etat, l'ensemble des flux (emprunts nouveaux et remboursements) doit être inscrit dans le budget et l'emprunt est réservé au financement de la seule section d'investissement. C'est la 'règle d'or' des collectivités territoriales. La recette de l'emprunt, comme son remboursement, sont inscrits dans cette section, les charges financières figurant en section de fonctionnement. Les sommes empruntées ne creusent donc pas le déficit de fonctionnement mais répondent exclusivement à un besoin de financement de l'investissement.

 

Batiactu : Quelle est la première action que vous attendez du prochain président ?
Jacques Pélissard :
Nous attendons du président élu un rapport de confiance, de partenariat. Pour rappel, nous ne sommes pas des structures qui appliquons les décisions de l'Etat. En revanche, nous souhaitons travailler en amont pour mieux répondre aux inquiétudes des collectivités. C'est le cas depuis vingt-ans. Nous devons être avant tout des partenaires et entretenir des rapports plus efficaces avec l'Etat.

 

Batiactu: Que devra-t-il vous dire à peine élu ?
Jacques Pélissard :
Un président responsable élu devra avant tout nous parler d'un bon partenariat avec l'Etat. C'est fondamental.

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