AVIS D'EXPERT. Interdite depuis 1997, l'amiante est toujours bien présente dans un grand nombre de revêtements routiers et représente encore un risque majeur pour la santé des travailleurs sur les chantiers de travaux publics. La responsabilité de cette prévention du risque sanitaire incombe aux maîtres d'ouvrage des chantiers. Mais concrètement, quels sont les paramètres à prendre en compte et quelles étapes doit suivre leur stratégie ? Eléments de réponse avec Ginger CEBTP.

Interdite depuis 1997, l'amiante est toujours bien présente dans un grand nombre de revêtements routiers et représente encore un risque majeur pour la santé des travailleurs sur les chantiers de travaux publics. Pour prévenir ce risque, une circulaire ministérielle publiée le 15 mai 2013 a rendu obligatoire les tests permettant d'établir la présence éventuelle d'amiante et donc d'équiper les travailleurs en conséquence. La responsabilité de cette prévention du risque sanitaire incombe aux maîtres d'ouvrage des chantiers : sociétés autoroutières et collectivités locales en charge des travaux routiers ont donc à définir des stratégies de prévention efficaces. Mais concrètement, quels sont les paramètres à prendre en compte et quelles étapes doit suivre une telle stratégie ?

 

L'amiante mais pas seulement

 

La première obligation d'un maître d'ouvrage est de contacter une entreprise compétente pour procéder à la caractérisation des enrobés routiers concernés par le chantier. Cette caractérisation doit porter sur « l'amiante » et les hydrocarbures aromatiques polycycliques ou HAP, des polluants dont la teneur ne doit pas excéder certains seuils réglementaires. Le terme « amiante » est sujet à polémique, car il n'y a pas un amiante mais une dizaine dont six sont interdits, les autres n'étant pas mentionnés dans la réglementation. Dans les enrobés on recherche originellement de l'amiante chrysotile dit « industriel » mais il arrive que l'on trouve aussi en trace de l'amiante « naturel », réglementé, comme de l'actinolite asbestiforme, ou des fragments de clivage, non réglementés pour le moment. L'ANSES a récemment publié un avis au sujet de ces fragments de clivage et recommande à l'Etat de ne plus parler d'amiante mais de « particules minérales allongées » ou PMA.

 

Une phase de caractérisation du risque

 

Une fois le choix du prestataire établi, le maître d'ouvrage peut mettre en place une campagne de caractérisation de l'ensemble du réseau dont il a la responsabilité ou opter pour des opérations ponctuelles à chaque nouveau chantier. Concrètement ces tests prennent la forme de carottages effectués sur chaque portion de route à une profondeur variable selon le type de travaux envisagé. Les échantillons ainsi prélevés sont préparés en laboratoire et analysés au microscope électronique à transmission à la recherche de fibres d'amiante puis les résultats des mesures sont communiqués au maître d'ouvrage.

 

Ayant pris connaissance de ces données, le maître d'ouvrage doit choisir en conséquence l'exécutant des travaux. Il est de sa responsabilité de s'assurer que le prestataire choisi dispose des habilitations adéquates pour le type de travaux prévu : habilitation aux travaux de sous-section 4 pour les plus superficiels et de sous-section 3 pour les plus conséquents (rabotage, démolition, etc.). Le maître d'ouvrage peut exiger du prestataire les attestations de formation du personnel, et les descriptions des modes opératoires (instructions) validés par la médecine du travail.

 

Le nécessaire suivi des mesures de sécurité

 

Pendant la phase d'exécution des travaux, il est de la responsabilité de la collectivité ou de la société en charge de la maîtrise d'ouvrage de s'assurer que toutes les mesures de sécurité seront bien prises par le prestataire. Il est notamment nécessaire de vérifier que les équipements de protection individuels sont adaptés au niveau de risque, les normes sur ce point ont été durcies il y a peu et imposer leur observation est une tâche primordiale du maître d'ouvrage. Sur le chantier, des relevés d'empoussièrement pourront également être mis en place pour s'assurer que les ouvriers ne sont pas exposés à des taux trop élevés d'amiante dans l'air.

 

Pour faire face à ses responsabilités, la collectivité en charge de la maîtrise d'ouvrage doit donc faire effectuer les relevés nécessaires par une entreprise spécialisée, pouvoir justifier du choix des prestataires et enfin s'assurer que toutes les conditions de sécurité soient réunies pour le chantier et que les équipements de protection adéquats, individuels et collectifs, soient prévus. Le maître d'ouvrage doit se tenir au fait de l'évolution de la réglementation et de la recherche afin de pouvoir anticiper les bonnes pratiques à adopter et planifier intelligemment les campagnes de caractérisation des enrobés et les chantiers. Autant de mesures qui permettront ultérieurement de réduire les coûts et de limiter les risques sanitaires.

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