REACTION. Alain Maugard, le co-animateur du Plan de Rénovation énergétique des bâtiments, et Eric Jost, le directeur général de Qualibat, reviennent pour Batiactu sur l'enquête édifiante de l'UFC-Que Choisir qui met en lumière les pratiques commerciales douteuses de certaines entreprises du secteur. Tous deux déclarent vouloir écarter les délinquants qui salissent toute la profession.

Fidèle à son habitude, Alain Maugard, co-animateur du Plan de Rénovation énergétique des bâtiments, ne mâche pas ses mots quand il évoque les entreprises qui abusent des consommateurs : "Plus de 99,9 % des entreprises correctes ne doivent pas être salies par ces délinquants ! Nous avons la ferme volonté de lutter contre eux mais nous manquons de base juridique". Concernant les pratiques commerciales douteuses, voire malhonnêtes, celui qui est aussi président de Qualibat ne se voile pas la face : "Il y a des remontées sur ce sujet, il faut donc améliorer le dispositif RGE et le problème de ces pratiques est sur la table".

 

 

Allant plus loin, il analyse l'origine de ces problèmes : "Avant, la qualification servait à la maîtrise d'ouvrage professionnelle à distinguer les entreprises. Mais à l'ère du RGE, ces entreprises sont maintenant au service de cette maîtrise d'ouvrage occasionnelle que sont les particuliers. D'où une mise en concurrence qui fait émerger des pratiques commerciales douteuses et des prix déraisonnables". Le responsable du Plan s'emporte également après les établissements bancaires, également mis en cause par l'UFC-Que Choisir : "Il n'est pas normal que les banques incitent à contracter des crédits à la consommation pour financer de tels projets alors qu'il s'agit de crédits d'investissement dont les consommateurs ont besoin. Ce n'est pas le même monde".

 

Difficile d'évaluer la politique commerciale des entreprises

 

Selon Alain Maugard, il existerait un vide juridique pour les organismes certificateurs comme Qualibat qui peuvent se pencher sur les aspects techniques des installations mais pas sur les politiques commerciales pratiquées par les sociétés. Un sujet qui reste, pour l'instant, du ressort de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). "Nous sommes très préoccupés, il faut faire la chasse à ces entreprises. Mais pour pouvoir agir, il faut des plaintes, et pas juste des litiges auprès de l'UFC-Que Choisir. Nous essayons d'avoir des informations auprès des délégations départementales, mais c'est compliqué", avoue-t-il.

 

Le directeur général de Qualibat, Eric Jost, renchérit : "C'est une situation nouvelle pour les particuliers que ces démarches mensongères, agressives, que nous n'avons pas l'habitude de traiter". Il évoque des cas de particuliers bernés par de faux certificats notamment. Lui aussi explique que l'organisme certificateur, une fois informé de tels faits, se tourne vers la répression des fraudes et les directions départementales de la protection des populations (DDPP). "Il faut savoir s'il s'agit de publicité mensongère ou de fraude, avant un éventuel dépôt de plainte", détaille-t-il. Dans le cas où l'entreprise incriminée serait bien qualifiée RGE, il précise que Qualibat suspend temporairement le dossier, le temps d'éclaircir la situation. Mais les démarches commerciales et ventes sur les foires ou les salons se situent en bordure du périmètre d'intervention de son organisme. "Tout ce que nous pouvons faire est un engagement volontaire, de la part des entreprises, à respecter le code de la consommation et des pratiques commerciales", souligne-t-il.

 

Renforcer les contrôles, encore

 

 

Comme l'UFC-Que Choisir, Qualibat note que le phénomène est en hausse puisque de 90 signalements par an en 2016, le nombre de cas est passé à 150 en 2017. Pour lui aussi, le renforcement du dispositif RGE par une meilleure connaissance des entreprises candidates, notamment en examinant leurs bons de commandes, leurs factures et en vérifiant leurs pratiques commerciales, est nécessaire. L'amélioration du suivi des presque 75.000 entités qualifiées est un autre enjeu, pour les trois organismes que sont Qualibat, Qualit'EnR et Qualifelec. Il précise que l'an passé, 7.000 entreprises ont quitté le dispositif, toutes raisons confondues, y compris la cessation d'activité. Pour lui, les radiations pour fraude avérée restent confidentielles en nombre.

 

Concernant le Plan de Rénovation énergétique des bâtiments, Alain Maugard assure : "La concertation est en train de s'achever et le gouvernement tranchera assez vite ensuite pour fixer la feuille de route définitive prenant en compte d'éventuels amendements, y compris ceux sur la surveillance des tarifs". Pour lui, un véritable consensus politique existe autour de la question de la rénovation depuis plusieurs années déjà. "Le vrai problème est d'être plus le plus efficace possible ensemble, pour lutter contre la précarité énergétique", résume le co-animateur qui souhaite que s'instaure un management dans la continuité pour ce grand projet.

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