D'après des chercheurs du CEA et du CNRS, la "responsabilité climatique" de l'Empire du milieu ne serait pas aussi dramatique que généralement envisagée : certains polluants qu'elle émet lutteraient en effet contre le réchauffement global. Toutefois, la joie sera de courte durée puisque l'empreinte environnementale chinoise augmentera dans un avenir proche...

La Chine, son histoire plusieurs fois millénaire, sa muraille interminable… et ses pics de pollution innombrables. Un cliché qu'il faudra peut-être revoir, à en croire une étude publiée par des scientifiques du Laboratoire des sciences du climat, du Centre international de recherche en environnement et développement et du Laboratoire de météorologie dynamique. En adoptant une nouvelle méthodologie afin de déterminer les impacts des pays sur le climat planétaire, ils ont quantifié, à la baisse, la contribution actuelle de la Chine au "forçage radiatif" (déséquilibre d'origine humaine du bilan de rayonnement global).

 

Les chercheurs des équipes franco-chinoises (qui collaborent avec l'université de Pékin) ont ainsi distingué les contributions des gaz à effet de serre de longue durée de vie, de l'ozone et de ses précurseurs, et des aérosols. Ils ont créé un modèle qui couple les grands cycles biogéochimiques de la Terre (cycle du carbone, chimie atmosphérique des gaz à effet de serre), une reconstitution tridimensionnelle du transport des particules dans l'atmosphère et des reconstructions de l'albédo (pouvoir réfléchissant des calottes glaciaires) provenant de données satellitaires. Verdict : l'Empire du milieu contribue à hauteur de 10 % en moyenne au forçage radiatif, et de 12 % au forçage réchauffant (induit par les gaz à effet de serre, l'ozone troposphérique et la suie de charbon). Sa contribution au forçage refroidissant (aérosols dispersant le rayonnement solaire) serait de 15 % en moyenne.

 

Des polluants qui... luttent contre le réchauffement

 

Les scientifiques déclarent : "Cette responsabilité climatique de la Chine, premier consommateur d'énergie dans le monde, est moindre que ne le laissaient présager sa consommation énergétique et ses émissions de CO2 pour deux raisons : la première est le fort effet masquant des aérosols émis par la Chine - aérosols également à l'origine de la mauvaise qualité de l'air dans le pays. La seconde est que la méthode développée intègre les effets de toutes les émissions depuis 1750 (le début de l'ère industrielle), prenant ainsi en compte le fait que la Chine est un pollueur relativement récent". Corollaire paradoxale : en luttant contre la pollution atmosphérique locale qui l'étouffe aujourd'hui, Pékin va modifier son forçage radiatif et… augmenter sa contribution à l'effet de serre global. "En effet, réduire les émissions de précurseurs de particules polluantes (telles que le dioxyde de soufre) diminuerait l'effet masquant des aérosols chinois, et accélèrerait le réchauffement", annoncent les chercheurs. La seule solution serait de réduire concomitamment les émissions de gaz à effet de serre à longue durée de vie et de suies. Quoi qu'il en soit, la Chine s'est éveillée et elle bouscule l'équilibre mondial sur tous les plans.

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