ECONOMIES. Le budget du Logement devrait faire les frais de la diète budgétaire imposée par le Gouvernement. Une indication qui tombe alors que la grogne dans le monde HLM est loin de s'apaiser.

Le budget du Logement pourrait passer de 18,2 milliards d'euros (en 2017) à 16,5 en 2018 et 14,9 en 2019. Soit une chute de 18% en deux ans. C'est du moins l'information publiée par Le Parisien du 19 septembre 2017, dont les journalistes affirment avoir eu accès à des lettres de cadrage envoyées aux ministères, signées du premier ministre Edouard Philippe, datées de début août 2017. Le budget du ministère du Travail ferait également les frais de la politique gouvernementale, étant amputé de 4,1 milliards d'euros d'ici 2019 (de 15,3 milliards d'euros à 11,2).

 

En ce qui concerne le ministère de la Cohésion des territoires, en charge du logement, le courrier de Matignon prévoit toutefois, après 2019, une légère remontée du budget (15,1 en 2020, 15,4 en 2021 et 15,7 en 2022). D'après une source bien informée interrogée par le quotidien, les coupes qui seront présentées dans le budget 2018 devraient être moins rudes.

 

Les ESH montent à leur tour au créneau

 

Cette diminution du budget du Logement avait déjà été annoncée, à demi-mot, par Julien Denormandie, secrétaire d'Etat chargé du dossier du logement. Mais aucun chiffre n'avait filtré. Elle est notamment due à la politique que souhaite instaurer le gouvernement en matière de logement social. Des choix déjà largement critiqués par de nombreux acteurs du secteur, auxquels est venue s'ajouter, le 19 septembre 2017, la Fédération des entreprises sociales pour l'habitat (ESH).

 

"Les possibles mesures du plan logement du Gouvernement de baisse de 1,5 milliard d'euros du budget de l'APL et des loyers pour le secteur HLM interrogent l'existence même du modèle HLM", peut-on lire dans un communiqué envoyé par l'organisation. "Le risque est grand qu'une telle mesure conduise à passer d'un système fondé sur la solidarité nationale à un système fondé sur la seule solidarité entre ménages modestes accueillis dans le logement social", ajoute Valérie Fournier, présidente de la Fédération des Esh. L'organisme propose d'autres voies, comme mettre en place de "véritables allègements sur les normes", notamment dans le domaine de la construction.


Le mouvement HLM demande une suspension de la mesure sur les APL

 

Le 18 septembre 2017, c'est tout le mouvement HLM qui a une nouvelle fois témoigné, auprès du ministre de la Cohésion des territoires, Jacques Mézard, et de son secrétaire d'Etat Julien Denormandie, de son inquiétude. "La baisse des APL des locataires du parc social compensée par une baisse des loyers [...] ferait peser sur les seuls locataires du parc social la solidarité que le budget 2018 refuserait à nos concitoyens les plus modestes. Il s'agit de faire payer aux locataires Hlm les arbitrages budgétaires, sans produire la moindre amélioration de leur pouvoir d'achat. En outre, ces dispositions remettraient en cause la capacité des organismes à garantir l'entretien du patrimoine, leur implication dans la rénovation urbaine et le développement de l'offre nouvelle", peut-on lire dans un communiqué de presse. Ainsi, le mouvement HLM demande une suspension de cette mesure et la tenue d'une réunion réunissant toutes les parties prenantes concernées.

 

"Ces mesures ont un caractère profondément injuste. Elles visent le logement social alors qu'il s'agit du seul secteur à produire des logements abordables en Ile-de-France. Baisser les loyers les moins chers et ne rien faire pour baisser les plus élevés : quelle cohérence ?", s'insurge pour sa part Jean-Luc Vidon, président de l'Aorif, l'Union sociale pour l'habitat d'Ile-de-France.

 


L'inquiétude de Nathalie Apperé, président de l'Agence nationale de l'habitat (Anah)
Dans une lettre ouverte co-signée au président de la République, Nathalie Appéré, maire de Rennes et présidente de l'Agence nationale de l'habitat (Anah), et Emmanuel Couet, président de Rennes métropole, évoquent un "scénario du pire" en parlant du projet gouvernemental en matière de logement social. "Les ménages les plus modestes seront les premières victimes de la diminution drastique des aides personnalisées au logement (APL) et de la baisse unilatérale des loyers qui sera imposée aux seuls organismes HLM. Les bailleurs sociaux ne pourront plus répondre aux objectifs de production de logements neufs, de réhabilitation de leurs parcs anciens comme de services attendus par les locataires", affirment notament les auteurs. Les pistes qu'ils proposent sont celles de faire baisser les prix du foncier et de la construction, augmenter les aides publiques à la pierre, et investir massivement dans la rénovation urbaine. Une expérimentation de "loyer unique" va également être testée à Rennes. "Son principe est simple, profondément républicain, inscrit dans les valeurs du service public : 'un même logement, un même loyer'. Quel que soit le quartier, la commune de notre métropole ou l'organisme HLM, l'accès à un logement social sera proposé aux mêmes conditions. Nous garantirons ainsi aux ménages les plus modestes la liberté résidentielle et nous assurerons, dans la durée, une mixité réelle dans nos territoires."

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